Les Parrhésiens
de Philippe Bordas

critiqué par Veneziano, le 13 septembre 2025
(Paris - 47 ans)


La note:  étoiles
Langage et monde du Paris populaire
Un écrivain et photographe arpente de nuit le quartier de Montparnasse qu'il affectionne tant, et rencontre une sorte de fort des halles, à la carrure d'armoire à glace et à la démarche chaloupée laissant croire à une blessure. Intrigué par cette apparition semblant provenir d'un autre temps, il le suit, et se retrouve dans dans une salle de sports, au milieu d'autres malabars du même acabit. Et il découvre que ce petit monde a conservé le parler du Paris populaire.
Ce dernier existait encore jusqu'au début des Trente glorieuses et était déjà cher à François Villon et François Rabelais, auteurs fétiches de l'artiste narrateur. Le chef de bande de la salle de sport est dénommé Coligny, ses acolytes dénomment le nouveau venu Skeletor, en raison de sa dégaine malingre de cycliste. Voilà une étrange référence du début des années 1980 où ce monde n'existait déjà plus vraiment.
Et ce livre, à mi-chemin entre le roman et le récit de recherche historique, linguiste et sociologique, retrace la restitution d'un passé idéalisé par la langue argotique, présentant toutefois sa forme de poésie, voire d'esthétique, et la prise de muscle. Le résultat ne manque pas d'intriguer souvent, d'amuser ou d'inquiéter parfois. Il mérite les détours qu'il fait emprunter, malgré sa dominante viriliste qui manque un peu d'esprit paritaire. Les personnages féminins à la Audiard présentent aussi leur saveur au passage.
Mais cette lecture passe bien tout de même et en apprend sur un état d'esprit et une langue.