Et là le lieu plus loin que là
de Jean Loubry

critiqué par Débézed, le 8 septembre 2024
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Nostalgie d'un autre espace
Dans ce court recueil de poésies très épurées, composées de textes en vers très courts, deux ou trois mots seulement, des mots passés au sasse pour sélectionner les plus appropriés, ceux qui donnent le meilleur jus quand l’auteur les pressure pour en extraire l’essence profonde, celle qui exprime le mieux l’émotion, les sensations, la sensualité, …, que l’auteur veut, avec ses poèmes, transmettre à ses lecteurs.

Dans ces textes, j’ai ressenti le besoin de l’auteur de se confronter à l’espace : l’espace dans ses délimitations temporelles et spatiales, celui qu’on occupe, celui dans lequel on se meut, celui qui nous est imparti pour y vivre notre vie. Il exprime ainsi une certaine forme de déterminisme, évoque le destin qui nous est réservé et la fin de la vie qui est inéluctable.

« Le Temps est la durée de l’homme / mais l’homme n’est qu’une part / de la durée du Temps / … ».
« Il dit Ici / le temps fuit / et lui il dit / là-bas le temps dure // … ».

J’ai lu ce recueil comme un chant nostalgique entonné par un auteur qui serait né ici et qui serait parti là-bas avant de revenir ici poussé par un grand vent de nostalgie. Le chant de celui qui partit un jour puis revint en un autre temps là où sont ses racines.

« Je me souviens / je me souviens / et j’y retourne / Et j’y retourne / Et j’y accouche // … ».
« Là / Me souviens / Que c’était là / … ».
« … / Voilà le clocher / qui renaît du village / et le trou dans la terre / où je les ai couchés // … ».

Là-bas était l’autre vie, ici est une nouvelle vie, une vie qui fut déjà avant : « Loin les mots / de l’autre vie / … ». Une vie confuse peut-être comme le laisse supposer ce jeu de mots dans lequel « qu’on fût » joue avec « confus » : « ... / tellement / depuis toujours / ce fût là-bas / qu’on fût // mais aussi / tellement / confus / là-bas / … ».