Aliénor, reine captive
de Alison Weir

critiqué par Monocle, le 12 septembre 2024
(tournai - 64 ans)


La note:  étoiles
Fiction historique très intéressante
ALIENOR REINE CAPTIVE de Alison Weir "éditions Hauteville 2022 " isbn 9782381222806 736.- pages

Aliénor d'Aquitaine ou Éléonore d'Aquitaine .
Elle n'a que 15 ans quand elle épouse le futur Louis VII.
Il est à noter que le duché d'Aquitaine dont Aliénor est régnante reste distinct du royaume de France, malgré les efforts de l'abbé Suger, le conseiller le plus influent de Louis VI puis du jeune roi, dont le souci constant est d'agrandir le domaine royal.
Le ménage est bancal. Malgré l'intervention du pape Eugène III, qui les accueille à Frascati pour tenter de les réconcilier, les rapports ne cessent de se dégrader entre Aliénor et son époux. Et de plus le fruit de leur union est de deux filles… ce qui ne fait pas les affaires de la royauté.
Aliénor est ouvertement courtisée par Henri Plantagenêt, fils de Geoffroi, comte d'Anjou, duc de Normandie et époux de Mathilde, l'héritière du trône d'Angleterre.
Ce serait la reine elle-même qui aurait fomenté l'annulation de son mariage et prémédité ses secondes noces. Quoi qu'il en soit, l'annonce du divorce d'Aliénor retentit dans toute la chrétienté. D'autant qu'en 1151 Geoffroi meurt et qu'Henri devient par là même roi d'Angleterre.
Jusque là le livre relate ce qui est historiquement prouvé mais bien sûr en ajoutant des touches romanesques !
Le mariage a lieu en toute discrétion
Aliénor, qui avait donné deux filles à Louis VII, donnera huit enfants (dont cinq fils) à Henri. Tout semble donc aller pour le mieux, si ce n'est que la nouvelle reine s'intéresse bien plus à ses propres terres qu'à l'Angleterre, où elle n'effectue que quelques séjours, contrainte et forcée. Elle travaille surtout à reprendre en main le duché d'Aquitaine, perturbé par l'indiscipline des barons. Fine politique, elle accorde des franchises et des chartes aux villes pour se concilier la bourgeoisie.
Pour une affaire de succession, elle se dresse contre son mari en soutenant ses fils, Henri et Richard, puis Jean. Alors que, vêtue en homme, elle tente de se réfugier auprès du roi de France, son ancien époux, Aliénor est capturée. Henri II la fait enfermer au château de Chinon en 1173. Le scandale provoqué par la rébellion de la reine contre l'autorité de son mari n'explique pas tout. Depuis longtemps, en fait, Henri II ne se soucie plus guère de sa reine, qu'il ne rencontre que très rarement. Il faut dire qu'Aliénor est alors une femme âgée de plus de 50 ans, sans doute fatiguée par ses dix grossesses. Le roi est d'ailleurs amoureux de son actuelle maîtresse, la « Belle Rosemonde », lorsque éclate la fronde de ses fils. D'autre part, la notoriété croissante de la duchesse d'Aquitaine et son indépendance dans la gestion des affaires politiques font de l'ombre à Henri. Voilà pourquoi Aliénor reste prisonnière durant seize ans et ne sort de sa captivité que lorsque son fils Richard monte sur le trône à la mort d'Henri, en 1189.

À partir de la période romantique, la légende d'Aliénor reprend de l'ampleur, mais la caricature de la femme sensuelle et adultère laisse place à un portrait plus nuancé. Aliénor la scandaleuse reste la femme libre et séductrice, certes, mais avant tout la reine cultivée, imposant la richesse de la culture occitane à la brutalité des mœurs de la cour capétienne. Aliénor devient la « reine des troubadours », l'inspiratrice de l'amour courtois. Sa beauté et son charme inspirent les écrivains et les historiens. Son gisant, à Fontevraud, la représente un livre ouvert entre les mains. Aliénor incarne alors deux images, d'un côté la souveraine influente et opiniâtre, de l'autre la femme disposant librement de son cœur et de son corps.
Fut-elle une manipulatrice, sensuelle et adultère, comme ont voulu le faire accroire les historiens du siècle suivant ? Ou une victime qu'il faut plaindre, comme le suggère Georges Duby ? Il est certain que son rôle politique fut grand, et qu'elle donna une véritable impulsion à l'épanouissement de la culture occitane. Femme de caractère, elle assuma le scandale que provoqua son divorce. Et elle se soucia jusqu'à la fin d'aider ses fils à asseoir leur pouvoir, fussent-ils incompétents ou félons.
Voilà donc l'histoire qu'on peut lire dans les dictionnaires et encyclopédies qui foisonnent.

Un roman de fiction historique très réussi et captivant. A part quelques détails qui donnent le piment nécessaire à attiser les sens du lecteur l'exactitude des faits cités est exacte. S'il est vrai que l'histoire d'Aliénor reste assez floue dans les écrits de l'époque, que ses ébats sexuels sont pure fiction, les auteurs ont imaginé certains destins en respectant (à peu près) les chronologies.
Beau travail. Merci aux auteurs pour cet excellent ouvrage prenant et intéressant.