Sofia
de Olivier Duculot

critiqué par Débézed, le 4 septembre 2024
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
L'argent ne fait toujours pas le bonheur
Sofia, jeune fille belle et douée, initie à l’amour Victor, le fils d’un célèbre chirurgien esthétique qui a invité ses amis pour une fête dans la luxueuse villa de ses parents. Sofia est une fille mal aimée, elle n’était pas désirée par ses parents et surtout elle est plus belle que sa mère et que sa sœur la fille adulée de celle-ci. Sa mère a la poitrine menue comme son autre fille chérie, elle ne supporte pas que Sofia ait une poitrine généreuse attirant le regard, et même plus, des hommes et surtout qu’elle soit diagnostiquée surdouée.

Sofia ne supporte pas ses parents, sa mère autoritaire qui ne l’aime pas et son père totalement transparent à la maison. Elle ne travaille plus à l’école, se laisse aller et finit même par accepter une réduction mammaire imposée par sa mère. L’opération est réalisée par Paul, l’assistant d’Yves, le père de Victor, richissime propriétaire de plusieurs cliniques de chirurgie esthétique. Paul est un brillant chirurgien mais pour réussir sa carrière et gagner énormément d’argent pour épater sa femme, il s’adonne à la boisson pour tenir le coup et opérer de plus en plus de patients. Le jour où il doit réduire les seins de Sofia il est ivre et c’est un véritable massacre qu’il commet sur la poitrine de la jeune fille estropiée à jamais.

Après une dure traversée du deuil de ses seins, Sofia, pleine de résilience et de courage, commence des études de médecine à Montréal où elle s’installe pour de longues années sans aucun contact avec les siens. Sa mère vient enfin la visiter et elle reprend contact avec Yves, le chirurgien père de Victor qui l’avait charmée lors de la fête organisée par son fils. Ils s’aiment encore sans se l’être jamais dit…

Avec cette histoire pleine de cruauté et de désamour, Olivier, décortique les travers de la médecine esthétique où les médecins travaillent comme des forcenés pour gagner toujours plus d’argent pour alimenter leur réussite factice fondée sur leur splendide résidence, leurs superbes maitresses, leur femme cultivée et distinguée, leurs rutilants bolides, leurs fringues et bijoux de marque… Mais travailler ne suffit il faut aussi avoir recours à quelques arnaques : tarifs exorbitants, dessous de table indus, fraude du fisc, ne pas trop payer son personnel, … tout ce qui sera découvert quand les autorités mettront leur nez dans les pratiques d’Yves et Paul après le carnage subi par Sofia.

Olivier dessine ainsi le portrait de ces nouveaux riches qui veulent paraître, montrer qu’ils ont réussi, qu’ils sont les plus riches et le plus puissants, qu’ils peuvent s’affranchir des lois et règlements, des codes et usages professionnels et moraux, qu’ils sont au-dessus de la société, qu’ils sont les meilleurs, les plus forts, le plus doués, qu’ils ont toujours raison. Que le monde s’organise autour de leur nombril ! Que tout leur est dû, surtout le respect !

Ce roman c’est aussi un réquisitoire contre les femmes riches qui malgré leur fortune ne servent qu’à orner la vie de leur mari, à conduire leur somptueux train de vie, à assurer leur descendance tout en acceptant, sans maugréer, les maîtresses et amantes qui rassurent monsieur sur ses capacités de séduction. Les enfants comme les épouses ne servent qu’à valoriser leur père en perpétuant son art et en faisant fructifier sa fortune pour ceux qui en sont capables, les autres ne sont que des poids morts qui pèsent sur la famille et l’entachent de leurs incapacités.

Un tableau bien cruel de la société actuelle ou sourd tout de le même un rayon de soleil dans la résilience de Sofia et l’amour des deux tourtereaux malgré leur grande différence d’âge.