Corps opaques / Corpuri opace
de Salvatore Gucciardo

critiqué par Débézed, le 20 août 2024
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Corps en fusion avec l'univers
Ce recueil édité en Roumanie a été traduit par Daniel Corbu et proposé en version bilingue : en français sur la page de gauche, en roumain sur la page de droite. Il est composé de très petites strophes elles-mêmes composées de seulement quelques mots, souvent un ou deux. Ces strophes sont disposées sur la page : une au centre, la suivante sur la gauche et ainsi de suite pour remplir la page de quatre ou cinq petits poèmes. Ce recueil comporte aussi quelques très jolies illustrations de Salvatore, des peintures comme il sait si bien en faire : pleine de couleurs jaillissantes du sol pour inonder un ciel souvent très bleu mais parfois de feu. Ces tableaux ont quelque chose de mythologique, on dirait le feu d’Héphaïstos projeté dans le ciel ouranien.

Ce recueil exprime la force de l’univers qui projette ses flammes créatrices pour fonder le monde et l’humanité : « des corps opaques en fusion avec l’âme et l’univers » comme l’écrit Salvatore dans la gentille dédicace qu’il m’a adressée. Né en Sicile où il a vécu jusques à l’âge de huit ans, il a certainement connu et contemplé les éruptions de l’Etna et peut-être d’autres volcans de la région, comme le Stromboli, qu’il a conservées en mémoire pour les évoquer sur ses toiles où le rouge et le jaune s’enflamment comme les flammes du volcan.

Ces couleurs de feu, il les a traduites dans ses mots en des vers très épurés, minimalistes, pour nommer tout ce que ce feu fondateur a créé. « Ce sont des émotions flamboyantes qui donnent naissance aux ivresses intemporelles ».

« La dynamique / Emerge / Du néant / Elle incite / Le flux /Des flots ».
« Le silex / Et le feu / Cimentent / La fragilité / Des peuples ».
« La sève / De l’univers / Pénètre / Les corps cristallins ».
« La mémoire / Du vent / Etreint / Le brassage / Des sentiments ».

Salvatore aime les belles choses, la couleur, le feu, l’azur, il croit en le monde, en ses forces fondatrices et en l’humanité habitée de la puissance souterraine projetée dans l’éther. « La nature est là dans son attrait enivrant. Elle exhibe sa beauté, ses richesses. Elle ne se pose pas de questions. Elle se laisse vivre en harmonie avec l’aura de l’univers ». Un bien beau message de paix et d’espoir distillé dans ce monde en folie où peu sont ceux qui croient encore en un avenir radieux.