Sully: Bâtisseur de la France moderne
de Laurent Avezou

critiqué par Colen8, le 15 juillet 2024
( - 83 ans)


La note:  étoiles
Servir le Roi mais aussi sa propre renommée
A peine le Royaume de France a-t-il mis fin aux guerres d’Italie(1) qu’il se déchire de l’intérieur. Durant près de 40 ans les funestes guerres civiles entre le parti catholique de la Ligue et celui des protestants Réformés laissent un pays dévasté et ruiné(2). Sully, introduit vers 13 ans au service d’Henri de Navarre futur Henri IV lui voue dès lors une indéfectible fidélité veillant après l’assassinat perpétré par Ravaillac à bâtir leur gloire commune pendant sa longue retraite.
Sa carrière commence par les armes où il s’illustre par des compétences en artillerie et en logistique. Jusqu’à 35 ans il contribue aux conquêtes menant au couronnement du roi à Saint Denis, lequel décide alors une politique d’apaisement général. Ayant aussi révélé des talents de négociateur, enfin admis dans le cercle étroit des conseillers Sully parvient à cumuler presque toutes les charges de gouvernement à l’exception de la Justice, dont celle prestigieuse entre toutes de Surintendant des finances.
Il sait faire preuve d’un pragmatisme retors et brutal pour assainir la dette publique(3) partiellement détenue par l’étranger : la reine d’Angleterre, les princes allemands, le grand-duc de Toscane, les cantons suisses, les financiers florentins. Il ne manque pas d’autorité ni d’inventivité auprès des parlements régionaux récalcitrants pour libérer le domaine et les rentes de leurs aliénations antérieures. Enfin il promeut un aménagement fiscal rendu nécessaire pour préserver les populations rurales de la faillite.
Soucieux de forger sa propre renommée Sully s’est confiné dans la rédaction d’indigestes mémoires sous le titre « Œconomies royales ». Celles-ci se sont véritablement imposées à la postérité un siècle plus tard par le truchement d’une réécriture édulcorée plus concise et facile à lire. Dans la foulée les historiographes ont décliné ses mérites dans la gestion de l’Etat comparés à ceux d’autres célèbres ministres ultérieurs avant que s’en dégage progressivement l’image d’Epinal des manuels scolaires.
(1) Par le traité de Cateau-Cambrésis en 1559, année de naissance de Maximilien de Béthune, devenu au fil de sa carrière publique baron de Rosny, puis duc de Sully en 1606
(2) L’Edit de Nantes mettant à ces affrontements douloureux en 1598
(3) Estimée à 200 millions de livres pour un revenu de 7 millions en 1589