Ce fragile chemin des choses
de Philippe Leuckx

critiqué par Débézed, le 3 juillet 2024
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Sur la voie de la résilience
Je connais Philippe car je le côtoie virtuellement sur le blog Les Belles phrases d’Éric Allard où nous publions tous les deux. Je suis son collègue de plume, mais je suis, hélas, très loin d’avoir le talent qu’il manifeste dans ses divers écrits, surtout dans ses recueils de poésie. J’ai eu le plaisir d’en lire d’autres avant celui-ci, c’est un excellent poète, il vient de se voir décerner par L'Académie française le prix François Coppée pour son recueil « Le Traceur d'aube » édité récemment par Al Manar.

Dans ce nouveau recueil, en des vers très libres et des poèmes de formes très diverses, souvent courtes, Philippe écrit dans une langue douce, fluide où les voyelles et les diphtongues chantent comme l’onde fraîche d’un ru au creux de son val, des textes où quelques mots récurrents pourraient dévoiler le motif qui a donné naissance et sens à ce recueil. En effet, j’ai noté quelques mots qui reviennent plusieurs fois sous la plume du poète : vie, enfance (enfants), lumière, chagrin, jardin, hautes herbes, rue… « Dans les hautes herbes de la mémoire / sauvages et fertiles / tu fais de ton errance / un domaine de choix / d’où il te plaît / de prélever des pépites / de bonheur ».

Ces mots évoquent la vie, la renaissance à travers l’enfance, la lumière rallumée après la « Nuit close », titre d’un précédent recueil, qui faisait sans doute référence à la longue période d’attente angoissante et à la toute aussi longue maladie qui a emporté une personne qui lui était particulièrement chère. Ce nouveau recueil semble marquer un passage de la période de douleur à une période moins triste, à une sorte de mélancolie, passer de la douleur à la résilience comme un deuil qui se mourrait dans un souvenir mélancolique. « Il se peut que la lumière cède / le devant de la scène / à ces ombres nourries / des fantômes de l’enfance / nuit que traverse des mots sans queue ni tête / … ».

Les hautes herbes et le jardin évoquent la terre nourricière, celle qui fait vivre la faune et la flore, celle qui donne la vie, la vie après le deuil peut-être ? « L’hiver lime les vers / Césure dans la saison / ascèse / pour un voyage gris / quel chagrin de chat immobile / devant l’âtre froid ». et la rue évoque le mouvement, les autres que l’on rencontre. La vie qui continue. C’est comme ça que j’ai ressenti ce recueil, peut-être me suis-je trompé … ?

« Le poème vient de sous la paume / il naît de quelque lumière rasante / et d’un brin de solitude / mal guérie / … », que le poète retrouve sa joie de vivre une vie nouvelle qu’il contera en d’autres vers…