Sur la lecture
de Marcel Proust

critiqué par Sahkti, le 30 novembre 2004
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Proust, lecture intime
Dans la première partie de cet ouvrage, Proust émet l'idée (et l'envie) de nous parler des lectures qu'il aime. Mais cela va bien plus loin qu'un simple énoncé-liste de tous les livres qu'il a lus et appréciés. Proust nous fait part de ses souvenirs de lecture les plus intimes, de ses lieux de prédilection (le classique fond du lit à la bougie ou alors un recoin caché de la salle à manger), des ambiances propices pour s'adonner à ce plaisir, des choses qui l'agacent pendant qu'il lit (les adultes qui interrompent le galop trépidant de son imagination par leurs conversations ennuyeuses). Proust nous parle davantage de lui et de son enfance que des livres qu'il a lus et je trouve ça très bien, ça rend le personnage encore plus intéressant et attachant. Et puis ce goût du détail et de la phrase mélodieuse, ça crée une atmosphère indéfinissable.

Suit alors une longue démonstration de Proust sur la définition et le rôle de la lecture. Intéressant à plus d'un titre, avoir la vision de l'écrivain dans le rôle du lecteur mais également de celui qui produit les textes destinés à faire rêver d'autres lecteurs, les deux côtés de la barrière en quelque sorte.

Beau passage sur la lecture faite par les vaniteux qui veulent paraître et étaler leur savoir et ceux qui, au contraire, l'utilisent à des fins personnelles dans le seul but d'évoluer, en silence, intérieurement. La lecture prend alors des allures de religion que l'on vit par soi, pour soi, sans artifice ou témoignage trop voyant, tout est affaire personnelle et ne concerne que soi.
"Pour lui, le livre n'est pas l'ange qui s'envole aussitôt qu'il a ouvert les portes du jardin céleste, mais une idole immobile, qu'il adore pour elle-même, qui au lieu de recevoir une dignité vraie des pensées qu'elle éveille, communique une dignité factice à tout ce qui l'entoure."

Proust au service de la lecture, l'encensant et la recommandant. Un très beau texte, qui est la préface signée par Marcel Proust de "Trésors des Rois (Sésame et les Lys)" de John Ruskin.

(Vous trouverez ce texte en ligne, notamment sur: http://agora.qc.ca/reftext.nsf/Documents/…)
Des réminiscences mémorielles de la lecture 10 étoiles

Au-delà de la passion venue de l'enfance, la lecture est un dialogue distancié dans le temps, une amitié désintéressée avec l'auteur, absent de ce qui est bien une confrontation.
L'oeuvre a plusieurs degrés de découverte, celle de son objet et elle-même comme oeuvre, qui crée des émotions, des souvenirs bien au-delà du temps passés sur les lignes qui la matérialisent. C'est de la réflexion et des souvenirs qu'elle fait naître que viennent le dialogue, la réflexion et la passion.
Une nouvelle fois, Marcel Proust nous livre ses souvenirs d'enfance et de famille, pour mieux présenter la genèse de cette sorte d'addiction.
Il analyse également les usages, plus ou moins personnels ou vaniteux, qui sont tirés de ces lectures.

Il en ressort que l'intérêt fort est toujours possible. Derrière ces moults détails, se laisse sentir sa réflexion de la lecture comme apprentissage de périodes passées, de sentiments et de psychologie. Je pense que son étude en enseignement secondaire s'avèrerait très enrichissante pour les élèves.

Veneziano - Paris - 47 ans - 1 février 2009