La Foire aux Vanités
de William Makepeace Thackeray

critiqué par FranBlan, le 25 novembre 2004
(Montréal, Québec - 82 ans)


La note:  étoiles
Une formidable découverte...
Je n'aurais probablement jamais connu l'existence de ce formidable auteur classique de la littérature anglaise sans la distribution récente de l'adaptation cinématographique de sa non moins formidable œuvre littéraire: La foire aux vanités, (Vanity Fair).
Si les critiques plus ou moins favorables du film ne m'ont pas incitée à voir celui-ci, je n'ai pas hésité à lire ce classique de la littérature, pour mon immense bonheur!
Le regard que Thackeray accorde à l'élite sociale anglaise de ce début XIXe siècle est impitoyable.
Il qualifie celle-ci, fort à propos, de vaste foire commerciale tapageuse où chacun bouscule l'autre sans égard quelconque, dans le seul but d'acquérir la fortune, et par conséquent, la réussite sociale.
Sous-titré de "Roman sans héros…", Thackeray poursuit tout au long de ce récit les destins irrémédiablement liés de deux jeunes femmes aux caractères complètement opposés. L'étude du statut de ces deux femmes à l'intérieur d'une société exclusivement dominée par l'homme, par un homme, est un phénomène en soi et des plus fascinante, à cette époque.
Comme Balzac, comme Zola, l'auteur parsème cette fresque grandiose de toutes les activités humaines: amour, haines, intrigues, querelles de famille, conflits d'héritage, religion, rivalités noblesse/bourgeoisie, bals, guerres napoléoniennes…
Comble de bonheur, l'auteur n'hésite pas à s'attribuer le rôle du narrateur et celui-ci n'hésite nullement à interpeller personnellement le lecteur; fort sympathique!
Une formidable comédie humaine à l'anglaise, ponctuée du légendaire flegme britannique. Irrésistible!
Un devoir de lecture 8 étoiles

Voici les règles d'or pour assimiler la foire aux vanités :
Règle 1 : Votre meilleur ami peut devenir votre ennemi de demain.
Règle 2 : Quand vous aidez quelqu'un, dans un premier temps il vous est reconnaissant mais bien vite cette reconnaissance lui devient pesante. N'espérez jamais la réciprocité s'il devait vous arriver un revers.
Règle 3 : Les femmes en théorie aiment les hommes fidèles et intègres mais ont une attirance irrésistible envers les démons... les anges lassent !

Dans l'Angleterre bien pensante de la première partie du 19 ème siècle.
Amélia Sedley vient d'une famille riche. Quand la famille Osborne était dans la tourmente, ce sont les Sedley qui les aidèrent sans compter. Leur fils Georges était promis à Amélia de façon naturelle. Puis l'inverse se produit. Les Sedley perdirent leurs avoirs et les Osborne leur tournèrent le dos. Georges épousera malgré tout Amélia mais se fera exclure par sa famille.
Rebecca Sharp (dite Becky), elle, est une jeune femme désargentée et de naissance douteuse. Elle se mariera en secret avec le colonel Rawdon Crawley, fils cadet de Sir Pitt. Là aussi le mariage sera désavoué par la famille et le jeune couple mis au banc.
Comment évolueront ces personnages englués dans un univers dont les codes sont tentaculaires ?

Qu'en penser. Ce livre difficile, épais comme une brique, ardu et parfois rébarbatif a tout pour rebuter le lecteur téméraire. Il faut une sacrée dose de patience et des efforts de mémoire pour s'y retrouver dans la nuée d'acteurs qui s'entrecroisent.
Je suis content d'en avoir terminé avec ce devoir. Il est clair que sous d'autres facettes la foire aux vanités est toujours d'actualité dans notre monde. Les lieux de travail, les voisinages, les amitiés ou les couples fonctionnent selon le même schéma.
Maintenant comme avant... nous ne sommes pour les autres que ce nous possédons !

Monocle - tournai - 64 ans - 15 juillet 2019


Voici un livre étonnant qui va vous demander quelques efforts mais quel livre ! 10 étoiles

C’est pour moi une totale découverte et j’avoue que je n’avais pas compris que j’allais passer plus que quelques jours en sa compagnie ; en effet le livre fait 960 pages et on espère toujours que cela va nous plaire. En même temps, le nombre de pages ne me gêne pas plus que cela mais c’est toujours mieux quand le livre nous plaît !
Thackeray est un auteur du XIXème siècle alors oui les phrases sont longues, le vocabulaire est riche, les références historiques assez complètes, et les personnages assez complexes. Ce n’est pas un auteur de la littérature contemporaine, donc il faudra un peu de concentration et peut-être si vous êtes comme moi un peu de calme autour de vous. C’est un livre qui m’a réappris à prendre mon temps et à déguster chaque ligne de ma lecture. C’est une sensation très agréable et qui rappelle que la lecture est avant tout un plaisir et pas une course. Il faut se laisser guider par l’auteur.
Thackeray est un auteur de l’époque victorienne qui cache bien son jeu ! Malgré l’époque, malgré le fait qu’il est quand même « très anglais », Thackeray est un auteur atypique qui s’autorise des écarts incroyables. Il joue sans cesse avec son lecteur, il le fait participer, l’interpelle et lui demande quelques fois son avis ! Il se moque de ses personnages, des femmes certes mais notons aussi que les hommes en prennent pour leur grade, il se moque des Anglais et des Français (c’est très incisif - !-) et … il se moque de Napoléon. L’humour est présent à chaque page pour qui sait décoder l’écriture de Thackeray. C’est riche, drôle, décalé, cynique, ironique et très original.
Mais derrière cet humour, ce livre dénonce malgré tout beaucoup de travers de la haute société anglaise de cette époque : la hiérarchie dans les familles, l’étiquette, l’argent, l’héritage, les mariages arrangés, les amis qui n’en sont pas, l’éducation des femmes, la notion de réussite dans les hautes classes, le clergé, l’éducation et la place des enfants, l’armée et j’en oublie certainement.
Les personnages sont vraiment intéressants : ils sont complexes, ils ont beaucoup de relief et pour ne rien gâcher ils sont très caricaturaux de la haute société anglaise. Ils maîtrisent la rhétorique de manière prodigieuse. Ils n’ont pas peur de se ridiculiser pour l’étiquette qui est pour certains le seul et unique but dans la vie.
Arrêtons-nous quelques instants sur le singulier personnage de Becky Sharp. Elle est sans un sou et enfant d’un artiste peintre et d’une danseuse. Autant dire qu’elle est plutôt mal partie dans la vie. Mais elle est aussi belle, actrice, débrouillarde, audacieuse, attirante, calculatrice, séduisante, indiscrète, sans complexe et dépourvue de tout sentiment maternel. Elle arrive toujours à ses fins et utilise tous les moyens légaux ou non pour y arriver. Elle va déployer tout au long de l’histoire une énergie incroyable pour se hisser dans les plus hautes sphères de la société et son parcours est tout juste étonnant !
Donc, oui je vous conseille ce classique qui sort de l’ordinaire car c’est drôle et rythmé. Je n’ai pas vu le temps passer avec ce livre. Le plaisir de lecture que j’ai eu a largement compensé les efforts que j’ai dû faire à certains moments ! Bonne lecture !

Mandarine - - 52 ans - 1 mai 2019


Un théâtre de marionnettes 9 étoiles

Ridicules, vaniteux, manipulateurs ou naïfs, les personnages de Thackeray n'ont rien de bien attachant. Le sous-titre de l'oeuvre, "roman sans héros", l'annonce d'entrée de jeu. Même le prologue de l'auteur, où il dépeint son roman comme un théâtre de marionnettes présenté dans une foire, ne laisse aucun doute sur ses visées satiriques. "La Foire aux Vanités" est une vaste critique de la haute société anglaise du XIXème siècle, voire une attaque en règle contre l'hypocrisie, la méchanceté et le caractère superficiel des relations sociales.

Suivant les conventions de l'époque, "La Foire aux Vanités" fut publié en 20 épisodes de 32 pages sur une période d'un an et demi. Thackeray improvisait son récit au fil des mois, ce qui lui permettait de corriger le tir quand il s'égarait mais qui lui retirait l'avantage d'une révision globale au terme de son travail. On voit à certains moments que l'auteur se perd dans sa vaste fresque et oublie ou confond quelques personnages mineurs. Ces petites erreurs ne nuisent en rien à la cohérence du récit, mais on sent qu'il nous est pratiquement donné à lire un gigantesque premier jet. Ceci étant dit, les talents d'improvisateur de Thackeray sont surtout impressionnants et le roman bénéficie somme toute d'un indéniable sentiment de cohésion.

Rival littéraire de Charles Dickens (qu'il ne rejoindra jamais en popularité), Thackeray se distingue de son contemporain par une écriture sarcastique, mordante et bien souvent comique. De son propre aveu, le narrateur tire ses informations d'un tiers qui tenait lui-même ses informations d'un tiers. Cette distance entre le conteur et les personnages se ressent tout au long du roman. Ces derniers sont typés, souvent définis à gros traits. Becky Sharp, suivant son patronyme, est tranchante, manipulatrice, incisive. Amelia Sedley ("sadly") est triste et pathétique. Rawdon Crawley est rampant, écrasé par l'ambition de sa femme. Les intentions de Thackeray sont tout sauf subtiles. Peu de pitié pour cette société de clowns.

S'il effraie par sa longueur (plus de 1000 pages), "La Foire aux Vanités" demeure un roman accessible, immense mais sans grande lourdeur, et certainement plus facile à digérer que plusieurs classiques de la même époque. Une oeuvre amusante, un brin touffue, mais qui porte bien ses excès et qui se referme avec un sourire en coin.

ARL - Montréal - 39 ans - 2 décembre 2017


La grande comédie des vices humains 10 étoiles

Ce « roman sans héros » est celui de deux héroïnes ; mais peut-être Rebecca Sharp, aventurière sans scrupules, ne mérite-t-elle pas vraiment ce titre… Quant à Amélia Sedley, elle est si douce, si dévouée que cela en devient presque de la faiblesse. A peine sorties de pension, ces deux jeunes femmes que tout oppose vont se lancer dans la société britannique. L’Angleterre est alors engagée dans les guerres napoléoniennes et l’auteur mène ses personnages jusqu’à Waterloo. Nous suivons leurs parcours sur une quinzaine d'années, des parcours marqués par des amours contrariés, des revers de fortune, des amitiés brisées puis renouées…

La plume de Thackeray, volontiers satirique, s'amuse à esquisser des silhouettes grotesques, représentatives de tous les vices humains. Comment oublier le gros Joseph Sedley, fonctionnaire aux Indes, aussi fier de ses gilets clinquants que de son solide appétit? Dans cette galerie de francs scélérats, nous faisons aussi la connaissance de lord Steyne, un débauché notoire, de Pitt Crawley qui cache son avidité sous des dehors dévots, de John Osborne, exemple type de l'arriviste, et de son fils George qui mérite bien peu l'amour désintéressé qu'il inspire. Et ce n'est là qu’un échantillon de l'infâmie que vous serez amené à côtoyer ! Le message de Thackeray est sans concession: cette société peu recommandable est la vôtre, lecteur. Dans un monde où la tromperie, l'égoïsme et l'orgueil revêtent des parures respectables, il y a peu de place pour la véritable vertu. Un constat bien noir s’il n’était tempéré par une bonne dose d’humour !
Qui saura mieux tenir son rôle dans ce vaste théâtre des vanités humaines ? La charmante mais perverse Becky ou l'honnête Amélia ?

Ce roman, publié en 1847, est l’un des plus grands classiques anglais. Mille pages fourmillant d’aventures et de traits d’esprit, dont chacune se lit avec délectation. Le narrateur ne cesse d’interpeler le lecteur pour en faire son complice, et ça marche ! On est rapidement captivé par ce style enlevé et spirituel, par ces rebondissements incessants. Reconnaissons-le: tout comme son héroïne Becky, Thackeray n’a pas son pareil pour tisser des intrigues !

Pierrequiroule - Paris - 43 ans - 3 juin 2013


Roman sans héros ? 9 étoiles

Non, j’ai adoré notre chère petite Becky, héroïne atypique forte, et même avec tous ses défauts, sympathique, qui se bat bec et ongles pour se faire une place de choix dans l’Angleterre des années napoléoniennes.

« "Je voudrais qu'il en eût envie; je voudrais lui prouver mon aversion. Depuis deux ans, je n'ai reçu de sa part qu'insulte et outrage; j'ai été traitée par elle plus mal qu'une fille de cuisine. Jamais mot d'affection ni d'amitié, excepté de votre part. J'étais bonne pour soigner les fillettes de la petite classe et pour parler français aux jeunes demoiselles, jusqu'à m'en faire prendre en dégoût ma langue maternelle. Quant à parler français à miss Pinkerton, c'était le plus mauvais tour qu'on pût lui jouer. Elle n'y comprenait mot, et était trop fière pour l'avouer. C'est là, je crois, la cause de mon départ. J'en remercie le ciel, et cela me fait aimer le français. Vive la France! vive l'Empereur! vive Bonaparte!
- Ô Rebecca, Rebecca, quelle honte!" s'écria miss Sedley, car c'était le plus grand blasphème qui pût sortir de la bouche de Rebecca.
Dire alors en Angleterre: "Longue vie à Bonaparte !" était comme si l'on eût dit: "Longue vie à Lucifer !"
"Pouvez-vous bien avoir ces mauvaises pensées de vengeance et de haine ?
- Si la vengeance est une mauvaise pensée, elle est au moins naturelle, repartit Rebecca, et je ne suis pas un ange."
Elle ne mentait pas. »

C’est un « roman destiné à une société élégante et sentimentale », un classique définitivement. Un pavé, mais qui se dévore facilement. J’y ai trouvé quelques prévisibilités, mais je mets ça sur le compte de l’adaptation luxurieuse de Mira Nair (avec Reese Witherspoon) que j’ai vu il y a quelques années, alors j’ai perçu certains passages d’avance. Moi aussi, j’ai beaucoup aimé que l’auteur brise le quatrième mur, complice du lecteur. C’est un livre excellent.

« Mais notre cher lecteur se rappellera que cet histoire annonce sur son titre, en gros caractères, Foire aux Vanités, et la foire aux Vanités est une place où l'on rencontre toutes les vanités, toutes les dépravations, toutes les folies, où l'on se coudoie avec tout sortes de grimaces, de faussetés et de prétentions. »

Nance - - - ans - 17 janvier 2010


trop peu connu 10 étoiles

Voici le chef d'oeuvre anglais du XIXème siècle, écrit par le grand William Makepeace Thackeray, et seul Dickens peut rivaliser avec lui en ce qui concerne l'impact littéraire qu'eurent ses romans à cette époque. La Foire aux Vanités est sans contexte son plus grand livre dans lequel Thackeray dévoile tout son talent pour la satire, la critique des moeurs et les exquis portraits des protagonistes. Le titre est révélateur de la toile de fond du roman, où toutes ces personnes se déchainent dans cette Foire qu'est le Londres du XIXème pour arriver à leur fin. La plus remarquable de ces personnes reste Becky, l'héroïne la plus machiavélique de toute la littérature. Vouloir épuiser toute la richesse de ce roman est impossible, tant la psychologie est poussée chez Thackeray, tant les expressions et les sentiments sont frappants de justesse. Reste à savoir qui aura votre préférence dans cette Foire aux Vanités, il y en a pour tous les goûts et surtout pour les plus mauvais, en ce qui me concerne, William Dobbin est le plus attachant mais qui sait si la pieuse mistress Bute Crawley ne saura vous charmer avec ses doux sermons sur l'enfer ?

Don_Quichotte - Metz - 37 ans - 1 août 2005