Sa seule épouse
de Peace Adzo Medie

critiqué par Débézed, le 26 août 2023
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Epouse libre
Afi raconte comment s’est déroulé à Ho, petite bourgade à l’est du Ghana, son mariage par procuration avec Elikem, Eli, son cousin dont la famille a fait fortune dans différentes affaires. Elle n’a jamais vu celui qui devient son mari, elle a cédé à la pression de sa mère, veuve peu fortunée, et de sa tante qui fait travailler cette dernière, sa sœur en fait. La tante veut marier sa nièce avec son fils car il vit avec une femme libérienne qui n’accepte pas du tout les coutumes locales et surtout pas la tutelle familiale de sa très rigide belle-mère. C’est une femme libre qui a ses propres affaires.

Le frère d’Eli accompagne Afi à Accra où elle loge dans un appartement de luxe dans une résidence de grand standing, Elle dispose de tout le confort et même du luxe qu’elle souhaitait mais elle ne voit toujours pas son mari. Elle le découvre enfin à l’occasion d’une visite éclair et en tombe amoureuse. Pressée par sa mère et sa tante, elle demande à son mari de quitter sa maîtresse et de vivre avec elle comme il devrait le faire. Eli tergiverse sans cesse jusqu’à ce qu’Afi le découvre avec sa superbe maîtresse. Elle décide alors de le quitter malgré les fortes pressions familiales.

Elle a complété sa formation de styliste et ouvre un magasin avec l’appui de son mari, ses affaires marchent bien, elle veut être libre et vivre par ses propres moyens avec l’enfant qu’elle a eu avec Afi qui a lui une fillette avec sa maitresse. Elle ne veut pas vivre dans une prison dorée avec l’argent de son mari. Elle a compris qu’Ali en aimait une autre et qu’il ne la quitterait jamais comme, elle, ne partagerait jamais son mari avec une autre.

Dans ce roman, Peace Adzo Medie met en scène la condition de la femme africaine propriété de son mari qu’elle doit souvent partager mais aussi la condition de toutes les femmes qui souvent doivent se battre avec opiniâtretés pour pouvoir faire ce qu’elles ont envie de faire, aimer ceux qu’elles ont choisi d’aimer et entreprendre et réaliser ce qui les passionne et peut les faire vivre sans quémander quoi que ce soit à quiconque.

Ce roman met aussi en lumière certaines des tares qui gangrènent l’Afrique encore plus que d’autres continents : la corruption, l’affairisme, les magouilles de toute sorte, les prises d’intérêts illégales, les ententes frauduleuses, les passe-droits abusifs, … . toutes les combines qui permettent à certains de constituer des fortunes colossales pour trafiquer avec les hommes d’affaires internationaux à la recherche, tel des rapaces, de toutes les proies qu’ils peuvent dévorer.

L’auteure provoque ainsi la rencontre de deux mondes, celui des affairistes locaux enrichis avec la bénédiction des Européens, Soviétiques, Chinois, Arabes, ou autres encore. Les premiers ne cherchant qu’à copier ceux qui les ont aidés à construire leur fortune sans penser réellement à développer le pays qui les a vu naître et voit grandir leurs enfants. De nombreuses femmes africaines ont désormais compris qu’elles devaient s’investir elle-même dans leur travail, créer leurs propres affaires et rompre le lien de dépendance avec les grandes fortunes locales ou étrangères. La femme pourrait bien être l’avenir de l’Afrique !