Du retour : Abécédaire biopolitique
de Anne Dufourmantelle, Antonio Negri

critiqué par Kinbote, le 21 novembre 2004
(Jumet - 65 ans)


La note:  étoiles
Une pensée en action
De A comme Arme à Z comme Zénon d’Élée, en passant par B comme Brigades rouges, E comme Empire, J comme Joie, R comme Retour, V comme Venise et Y comme yeux, Antonio Negri décline une vie passée sous le signe de la résistance et de la pensée comme mode de résistance.
A un moment, Anne Dufourmantelle qui est son interlocutrice lui demande: "Vous n’auriez pas été emprisonné s’il n’y avait pas eu de pensée?" Et il répond que la vraie pensée est une chose très dangereuse. En effet, lui qui à tort aura été accusé d’être l’inspirateur des Brigades rouges et à l’origine de l’assassinat d’Aldo Moro a passé 30 ans de sa vie soit en prison soit en exil. Jamais il n’a pris une arme, commis d’attentat ou de hold-up (oui, entrer dans une banque pour prendre de l’argent, précise-t-il avec ironie, et de rappeler ce mot de Brecht : « Entre fonder une banque et la dévaliser, on ne sait pas ce qui est le plus criminel »). Lors de son exil parisien des années 80, il rencontre et devient l'ami des Guattari, Deleuze, Foucault qui via Spinoza , Machiavel ou Kant cisèleront sa pensée et lui permettront d’écrire avec Michael Hardt, « Empire », un livre marquant l’entrée dans le XXIème siècle, qui en pensant la globalisation et l’altermondialisme donnera avec entre autres le concept de multitude des armes théoriques pour s’opposer à un capitalisme devenu planétaire.
Depuis un an, Toni Negri a purgé sa peine en Italie, où il est retourné affronter la justice de son pays et, bien qu’il n’ait plus le droit d’enseigner, il continue de propager ses travaux par des conférences et à écrire avec cette même vigueur qui lui a fait combattre la pauvreté et les injustices depuis plus de septante ans.
L’allègre traversée d’une existence vouée à l’action...de penser.