L'accordéon du silence
de Anne-Marielle Wilwerth, Pascale Lacroix (Dessin)

critiqué par Débézed, le 1 mai 2023
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Esquif poétique
Anne-Marielle connait actuellement une période particulièrement faste dans son activité éditoriale, ainsi, j’ai eu le plaisir de lire depuis juin dernier : « Vivre au plus près » (le Cygne), « Naître à l’immense » (Grenier Jane Tony), « L’accordéon du silence » (Le Coudrier) objet du présent commentaire et il reste sur mon bureau : « D’abord le souffle » (Le Taillis du pré). On dirait que les éditeurs s’arrachent ses poèmes. C’est à chaque fois un plaisir, un véritable bonheur, de lire ses vers presque toujours très courts mais si expressifs et si légers, évanescents mais si émouvants. La patte d’Anne-Marielle, son style, son esprit, son inspiration sont très personnels et particulièrement reconnaissables. Dans un premier poème, elle expose sa vision de la poésie : « La poésie / en silence / nous conduit à la lisière du voir // … »

Ce recueil a été pour moi l’occasion de rencontrer Joëlle Aubevert, l’éditrice des Editions le Coudrier qui m’a gentiment fait découvrir ses publications où j’ai retrouvé de nombreux auteurs que j’ai déjà lus mais plutôt dans des romans, c’est donc un exercice qui me séduit particulièrement de découvrir ses auteurs sous un autre angle, dans un autre exercice littéraire, dans une autre forme d’expression. Le présent recueil imprimé dans un format à l’italienne bien agréable à feuilleter pour le lecteur est introduit par une préface de Patrick Devaux et illustré par de jolis dessins abstraits aux couleurs pastel de Pascale Lacroix qui évoquent le milieu aquatique dans lequel flotte ce recueil. « Bercée par la houle / j’écoute le chant rassurant de l’océan / … ».

Celui-ci se compose de plusieurs chapitres qui tous évoquent le milieu marin : une île, un rivage, des estrans, un port, du vent, des embruns, …, un monde ouvert à tous les zéphyrs qu’Anne-Marielle laisse souffler dans ses vers. Ce monde, un espace largement ouvert, c’est aussi celui de la solitude, du silence, du temps qui s’écoule, du retour en soi… «L’île porte en permanence / la fine écharpe du vécu / … ». « Les habitants que l’île a façonnée de ses mains d’ajoncs / ont sciemment jeté l’ancre dans le temps / … ». Le monde d’Anne-Marielle, les vers d’Anne-Marielle, c’est un monde d’impressions, de sensations, de suggestions, un monde évanescent, éphémère que le lecteur construira lui-même dans le souffle de ses poèmes.

« … / Je crois que je suis née / dans la barque abandonnée d’un poème / Il faut que j’apprenne à fendre les vagues / du grand chaos / à ramer / vers cet essentiel / si mal éclairé ». Et nous serons heureux si tu acceptes de nous embarquer à bord de ton esquif.