Pendant que les mulots s'envolent
de Corinne Valton

critiqué par JPGP, le 25 avril 2023
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Corinne Valton la styliste
Corinne Valton concrétise ce qu’écrit Bernard Noël : "C'est en défaisant qu'on fait". Ses nouvelles cependant offrent moins des déconstructions que des transformations du monde à travers ses nouvelles souvent drôles. Les personnages sont parfois reliés d’un texte à l’autre selon divers rapports par accrocs, jointures, coutures. En ce sens l’auteur lutte contre la ressemblance à « façon » (pour parler couture) et par voie de conséquence contre nos constructions mentales.

Les nouvelles multiplent cambrures et spasmes. Les personnages sortent des limbes du quotidien pour devenir chimères propre à d’extraordinaires voyages entre le dehors et le dedans. En dépit de la présence du monde contemporain les textes n’en représentent pas le simple miroir mais saisissent ce qui fait du réel un marécage afin d’en faire saillir des envols particuliers.

Au réel, la jeune créatrice propose ses nécessaires césures et hiatus. Le concept d’imaginaire y trouve un nouvel essor. Les personnages y sont autant entravés que libres en des histoires dégingandées. Contre les simples apparences des jeux de surface du quotidien la profondeur prend droit de citer. Surgissent des achèvements paradoxaux par effet de béances. Tout est transmutation vers d’iconoclastes béatitudes. Au besoin le réel s’érotise en absence de corps - l’inverse est vrai aussi.

Chaque nouvelle montre par dessous ce qui est fomenté en dessus. Le concept de détricotage des apparences n’a donc plus besoin de traités théoriques : une nouvelle suffit. Dans chaque nouvelle la compacité du tissu du réel s’ajoure, crée le clair, le transversable. Les pères ; les mères et leurs enfants en perdent les deux premiers leurs racines les autres leurs repères. Il y va d'un dégorgement dans de sacrés manèges et ménages.

Jean-Paul Gavard-Perret