Économie pour le XXIe siècle
de Eloi Laurent

critiqué par Falgo, le 12 mars 2023
(Lentilly - 84 ans)


La note:  étoiles
Révision capitale de la science économique
Durant mes études j'ai étudié l'économie et ce livre me conduit à réviser nombre des principes fondamentaux sur lesquels reposait l'enseignement que j'ai reçu. Ce que devraient faire aujourd'hui tous les économistes et gouvernements du monde.
Laurent fonde sa réflexion sur un certain nombre de constats qui conduisent à faire "de l'économie du XX° siècle une discipline insoutenable" (p.15). Le constat le plus visible est le réchauffement climatique dont les conséquences à terme sont terrifiantes. Mais ce constat visible a des causes profondes: l'augmentation démesurée des besoins humains et l'externalisation de ses conséquences négatives (dont le COVID 19 n'est qu'une manifestation), l'épuisement des ressources naturelles de la terre, la dégradation de la biodiversité, la constitution de sociétés de plus en plus inégalitaires. Il plaide donc pour l'établissement d'une "économie du bien être essentiel" (p.12) reposant sur une économie écologique et une nouvelle définition de l'économie politique. Pour ce faire il préconise un retour vers les sources de la pensée économique (Aristote, Xénophon dès le IV° siècle avant notre ère) et l'articulation entre les buts économiques et les ressources qu'ils consomment, établissant le concept de la sobriété des besoins humains. Il considère en conséquence que la "science économique" doit être revue dans se principes opératoires. Pour cela il s'appuie sur ses propres recherches ainsi que sur de nombreuses autres provenant du monde entier et de plusieurs disciplines scientifiques.
En particulier il remet en cause deux piliers des politiques économiques actuelles: la croissance et le Produit Intérieur Brut (P.I.B.) et les remplace par des indicateurs du bien être social mondial qui intègrent les notions de justice et d'égalité, insistant sur l'obligation d'aller vers plus de sobriété de la puissance publique comme des particuliers et de la nécessité du partage juste des ressources ( on pense en particulier à l'eau).
Pour atteindre ces objectifs Laurent a établi un manuel des transitions justes qui permettraient de passer de la situation actuelle à l'objectif, tel qu'il le définit. Cela relève d'une certaine forme d'utopie, rejoignant en cela "La Voie" d'Edgar Morin. On se trouve devant un cheminement escarpé et difficultueux demandant d'innombrables remises en cause dont, l'épaisseur du live ne permet pas le détail, l'exécution n'est pas abordée. Il indique ainsi de "ne pas posséder d'animaux domestiques" (p.155) ou que le capitalisme est probablement un système néfaste (p.202) , mais ne dit pas comment les faire disparaître, ni en combien de temps, ni par quoi les remplacer. Ceci constitue la limite d'un tel livre, par ailleurs si riche de réflexions e d'indications de toutes sortes. Un de ces, très rares, livres permettant de réfléchir un avenir qui s'annonce si difficile.