Daewoo
de François Bon

critiqué par Ulrich, le 30 octobre 2004
(avignon - 49 ans)


La note:  étoiles
l'effrayante réalité
L'effrayante réalité de notre système économique, voilà bien le sujet de ce livre. Daewoo mais le pire c'est qu'il aurait pu aussi s'intituler Métaleurop, Sollac, Stein Industrie, Lu,...
Roman, Récit sociologique, théâtre, l'auteur F. BON hésite lui-même. Il nous emmène en spirale dans la fermeture de cette usine aux bras des travailleuses (oui il s'agissait quasi exclusivement de femmes). Ces travailleuses qui oscillent de l'espoir, à la peur, à l'enfermement et même parfois à la mort. Tragique destin, héroïnes bien malgré elles d'un libéralisme à la mode du 21ème siècle et que nous oublieront bien trop vite. L'écriture est scandée. Un rythme de batterie. Au début, c'est plaisant mais la lassitude arrive vite. Peu importe, cette immersion est salutaire. Elle rappelle plus qu'utilement que derrière la litanie des plans sociaux annoncés dans les médias, ce sont des vies brisées et détruites qui se cachent. Comme toujours, l'espoir existe. Mais il est si ténu et si fragile qu'on a la terrible impression qu'un jour il disparaîtra. Ce jour-là, l'économie aura définitivement oublié qu'elle est au service des hommes. Elle ne nous considèrera plus que comme une composante supplémentaire au même titre que le capital ou l'argent. En nous immergeant dans cette réalité, François BON nous rappelle avec justesse que ce sombre avenir n'est pas si loin. Utile !
Résignation et fatalité 6 étoiles

A tous les travailleurs de ces entreprises mises sous plans sociaux, on demande de la résignation face à ce qu'on présente comme une fatalité économique. François Bon s'immerge avec beaucoup de réussite dans les pensées de ces travailleurs qui comptents leurs euros en fin de mois et se font virer parce que les bénéfices des entreprises ne sont plus assez plantureux aux yeux des actionnaires. Son travail est beaucoup plus efficace qu'un pamphlet ou un essai économique ennuyeux, car il place l'homme avant la machine et ça fait froid dans le dos de se dire qu'on est peu de choses dans ce vaste rouage économique qui broie les usines les unes après les autres.

Sonia_P - Honfleur - 55 ans - 2 novembre 2004


Un drame de notre temps 7 étoiles

Quand s'effacent une à une les six lettres D, A, E, W, O, O sur l'imposante façade d'une usine de Lorraine, c'est aussi les vies de centaines d'employées qui s'effacent progressivement. Ce drame de notre temps, comme le dit bien Ulrich, aurait pu tout aussi bien s'appeler Renault Vilvorde, DHL,... Malheureusement les exemples ne manquent plus. Daewoo pour le coup, c'était en Lorraine en novembre 2002. Après avoir profité de 35 millions de subsides pour installer des usines dans cette région de l'est de la France, la marque coréenne tire le bilan. Résultat: non rentable! Alors, on vire, on met la clef sous le pailasson et l'on va voir si l'herbe est plus verte ailleurs. Triste définition que celle de délocalisation. François Bon, interloqué par ces situations qui se répètent à intervalles réguliers dans notre actualité, a pris son bâton de pélérin, son stylo, mais aussi et surtout le mini-disc du journaliste pour écrire ce roman, véritable témoignage social. Un roman qui veut faire oeuvre de mémoire. Refuser l'effacement de ces femmes privées d' emploi, alors que les médias sont déjà passés à autre chose. Le romancier utilise la large palette des usages journalistiques pour arriver à ses fins. Du reportage à l'enquête, en passant par le billet d'humeur. De ces rencontres et prégrinations, François Bon a gardé des impressions, des regards, des silences; et écrit un livre critique et bouleversant sur une certaine économie et les ravages qu'elle peut provoquer..

Nothingman - Marche-en- Famenne - 44 ans - 1 novembre 2004