Le curé travesti
de Jean-Pierre Bourgeron

critiqué par JPGP, le 26 décembre 2022
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Abbé Louis le dernier du culte
Le directeur de la collection Eros Singulier a été mis - il y a quelques années - sur la piste du journal d’un curé de campagne au cœur de la France. De ce massif central le préfacier et éditeur a retenu les poèmes, fragments, récits ou facéties où le prélat pour se prélasser s’est amusé à compasser les descriptions minutieuses de travestissements et de diverses combinaisons sexuelles.

Libidineuses, voluptueuses, fantasmatiques et drôles ces œuvres sont plus le fruit d’un pur scripteur que d’un pratiquant. Il est vrai que dans la campagne française au milieu du XXème siècle, un abbé ne pouvait jouer les Molinier. Et le queer demeurait une vue de l’esprit. Le penchant pour la chair devint néanmoins un sacerdoce littéraire dans les moissons d’un prêtre où l’ivresse est préférée au bon grain.

Les textes posent la question de ce que l’on voit lorsqu’on lit. Et se perçoit aussi comment un pratiquant de la dérision et de l’autodérision conteste les limites de la sexualisation et la sortie de leurs constructions officielles. L’abbé céda à une succession d’espaces désorientés où s’abolissent les repères.

Nul ne sait s’il fut inspiré, pour ses digressions, par les confessions sulfureuses de ses ouailles ou par les ondulations croupières d’une bonne gironde. En tout état de cause, demeure la méditation lascive d’un abonné à la solitude de presbytère. Surgit de manière compulsive un monde obsessionnel où l’auteur se plut aux infinis arrangements d’entorses de gouffres plus démoniaques que saints. Dieu l’en bénit.

Jean-Paul Gavard-Perret