Moi, qui que je sois
de Mathieu Lindon

critiqué par JPGP, le 25 décembre 2022
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Mathieu Lindon : fiction et sexualité
Mathieu Lindon en quatre parties commence par l'approche de l'odeur nauséandonde - de l'héroïne en ce qui tient au départ d'un roman d'amour ou d'un conte de fée. Il traite ce genre avec beaucoup d'humour. Avant de glisser dans les parties suivantes dans le roman policier puis érotique et - enfin - d'offrir une synthèse dans le dernier moment du livre. Manière pour l'auteur d'offrir une certaine espérance puisque le futur est le lieu "où tout peut changer". Néanmoins comme tout horizon, cet espace reste mobile et par essence inaccessible.

L'auteur ne se préoccupe pas du sien (c'est le privilège du cieil âge...). Mais son corps - comme celui de l'autre - existent encore et toujours. Lindon tente d'en apaiser l'utopie comme l'illusion du miroir. Le sexe et la jouissance sont présents même si le membre reste le plus souvent "inutile". L'auteur s'en amuse en évoquant un "membre à plein temps pour usage saisonnier".

Il s'agit en quelque sorte de "faire de son cul une oeuvre d'art". C'est périlleux mais l'auteur s'attarde en rendre compte du plaisir en écho aux Mémoires de Saint Simon qui décrit selon de lui le mieux la jouissance - mais après mille pages...

Le romancier prouve qu'on peut parler du sexe sans être obscène. Il en soupoudre son livre en des variations de genres (littéraires) dans la volonté de défricher l'inconnu là où l'auteur entretient une intimité littéraire à Michel Foucault, Beckett, Duras, Robbe-Grillet et bien d'autres. Si bien que "Qui, que je sois" représente en conséquence un écho à l'insensé qui croit que l'autre n'est pas lui-même.

Lindon joue avec la langue avec humour, irrespect et liberté. Il prouve que tout fou a besoin d'amour dans son modeste cerveau pour un voyage hors du monde du simple "moi". L'auteur n'y parle pas de lui mais de l'ensemble des genres littéraires dont la clé est donnée à la fin du livre. La place de l'autobiographie est donc à la fois fictionnelle et référentielle.

Jean-Paul Gavard-Perret