Les chroniques de l'art contemporain
de Karine Tissot

critiqué par JPGP, le 17 décembre 2022
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Karine Tissot à la baguette
Karine Tissot dirige le CACY Centre d’art contemporain d’Yverdon-les-Bains qu’elle a créé 2013. Historienne de l’art, elle a travaillé entre autres au Musée d’art et d’histoire de Genève, puis au Mamco. Curatrice elle enseigne l’histoire de l’art et pratique une critique d’art pertinente et incisive. Armée d’une connaissance exhaustive des arts classiques elle demeure résolument ouverte aux expériences les plus avancées comme le prouve son rôle au sein du CACY

Le grand mérite de son approche est de - sans refuser l’unité structurale d’un cheminement - ne pas s’enfermer dans l’unité d’un seul système. Son parcours « prêche » d’ailleurs pour elle. Elle a tout compris de l’art et quoique plus analyste que praticienne elle pourrait faire sienne la phrase de Cézanne lorsqu’il affirmait “ si pour boucher des blancs je mettais quelque chose au hasard je serai forcé de reprendre tout mon tableau en partant de cet endroit ”. Car l’auteure pratique de même : elle rebondit d’un article à l’autre afin de provoquer des ouvertures. Chaque analyse crée une énergie « spatialisante » au sein des nombreux trajets d’artistes. Tous ceux qu’elle retient participent d’un projet très particulier dans leur genèse de l’espace. L’auteure a défendu par exemple Sophie Bouvier-Auslander qui ne cesse d’explorer le champ des possibles sous des formes multiples qui sont possiblement transcrites par le dessin.

L’approche de Karine Tissot tient à la fois du tissage et du métissage. Parmi les artistes présents ici se retiendront autant des artistes de Suisse qu’internationaux : de Peter Aerschmann, Luc Andrié, Edouard Chapallaz, Mio Chareteau, Frédéric Clot à Thomas Flechtner, Franziska Furter, Andrea Mastrovito, Tatzu Nishi, Gregory Stauffer, Bernard Voïta, etc.. Pour les « illustrer » la critique sort du discursif et entre dans l’incursif. Son livre prouve par exemple combien l’abstraction n’est pas forcément une idéalisation et encore moins une conceptualisation ni même la seule fin de l’art. L'impertinente offre des épiphanies très particulières frappées de ce que certains prendront parfois mais à tord pour des non-lieux. D’où l’importance d’une approche où il n’est pas seulement à la peinture-peinture de « perler ».

Jean-Paul Gavard-Perret