Louise Amour
de Christian Bobin

critiqué par CCRIDER, le 16 octobre 2004
(OTHIS - 76 ans)


La note:  étoiles
La merveilleuse légèreté de l'être
J'ai toujours eu un faible pour Christian Bobin . J'avais été profondément touché par "Le très bas" , sa délicieuse spiritualité franciscaine , son style inimitable et cette merveilleuse légèreté de l'être qui laisse pantois .
Et c'est avec un grand plaisir que j'ai retrouvé tout cela dans "Louise Amour" . Bobin est un auteur exquis , touché par la grâce , c'est l'un de nos derniers vrais poètes . Ses livres sont précieux , uniques , ils sont comme une eau fraîche au milieu d'un désert brûlant . Et n'en déplaise à certain , je ne le trouve ni "trop mystique , ni trop éthéré".
Evidemment , pour l'apprécier , il faut vouloir sortir de la fange habituelle et tourner son regard vers les étoiles .
Pour le comprendre , il faut une certaine fraîcheur d'âme et admettre que l'homme ne vit pas que de pain .
Le livre lui-même , si touchant par la simplicité de cette jolie histoire d'amour platonique n'en est pas moins si riche et complexe dans sa description poétique de la nature ou des méandres et des élans de l'âme humaine qu'il ne se laisse pas facilement réduire à un résumé ou à une critique péremptoire et que je comprends ( après avoir pesté intérieurement contre lui d'ailleurs) le camarade critique qui n'a pu écrire qu'une seule ligne sur d'autres livres de Bobin sur ce site , avouant ainsi son humble admiration .
Pour terminer , permettez-moi juste une ou deux citations : " Les livres sont de vieux serviteurs sur le dos desquels nous disposons , afin qu'ils les portent à notre place , nos craintes et nos espérances . Le temps passé à lire est du temps changé en lumière ." " Au fond , nous faisons le même travail : vous cherchez à faire tenir Dieu dans une phrase , dit-elle , moqueuse , et moi je cherche à l'enfermer dans un flacon ."
Histoire de vous inciter à lire Christian Bobin !
la beauté du verbe 10 étoiles

Tout est bon chez Bobin. Les mots, les personnages, les sentiments. À travers l'histoire de ce doctorant en théologie, tombé "en amour" d'une célèbre créatrice de parfums au nom évocateur, c'est une vision poétique du désir amoureux que nous offre cet auteur inspiré, plus de quatre siècles après la "Carte du Tendre". Un plaisir de lecture infini, aux multiples réminiscences, avec un certain parfum de "Nadja", qui ravira les amateurs de beaux livres…

Jfp - La Selle en Hermoy (Loiret) - 76 ans - 11 octobre 2015


Beau, très beau 7 étoiles

Alors, bien sûr, que dire du style de Christian Bobin? C'est soigné, poétique, élégant et raffiné.
Chaque phrase s'apprécie lentement, calmement, vous touche au plus profond. On a l'impression que chaque phrase est travaillée, retravaillée pour atteindre un équilibre parfait.
Malheureusement, j'ai un peu l'impression que trop d'esthétisme tue l'esthétisme et qu'une fois lue et savourée la dernière phrase, on a un peu la sensation d'avoir vu passer une étoile filante ou d'avoir bu un vin exceptionnellement bon mais qui ne reste pas en bouche...
Mais rien que pour apprécier la grâce de ce magnifique auteur, ce roman vaut le détour.

Bebmadrid - Palma de Mallorca - 45 ans - 26 décembre 2011


Les paraboles de Bobin 8 étoiles

Ce livre n’a beau faire que 150 pages, il prend du temps à lire. Il prend du temps, parce que chaque paragraphe regorge de beauté et de sensibilité et chaque phrase est soignée. Chaque mot semble avoir été choisi dans un but bien précis. S’il avait vécu il y a deux mille ans, Christian Bobin aurait pu être le cinquième évangéliste.

Bobin nous décrit l’amour sans borne que le narrateur éprouve pour Louise Amour. Il est devenu amoureux d’elle simplement en lisant son nom, comme le lecteur est attiré vers ce livre en partie à cause de son titre.

Un traité sur l’amour oui, mais aussi un éloge à la vie. Voilà le but que semble s’être fixé l’auteur en écrivant ce roman : «J’avais depuis toujours espéré un miracle et depuis toujours j’avais été comblé. Ce que j’appelais un miracle n’était pas un renversement spectaculaire des apparences mais, au contraire, une soudaine illumination de la vie ordinaire».

Ce qui semblera banal pour certains entraîne l’auteur dans un état qui frôle l’extase. Les nuances de rouge d’un oiseau ou l’apparence d’une fleur ont autant de force qu’un geste de grand éclat. Tout ça dans un ouvrage empreint de spiritualité et écrit dans un style poétique qui se donne comme mission de révéler au grand jour le beau et le vrai.

Leroymarko - Toronto - 51 ans - 24 août 2009


Sésame, ouvre-toi ! 9 étoiles

Ouvrir Louise Amour, c'est comme pénétrer dans la caverne d'un Ali-Baba littéraire, un monde de ravissement et de séduction poétique. Chaque page tournée découvre en effet, à notre esprit ébloui de nouveaux joyaux étincelant d'images enchanteresses; ici, c'est une perle de métaphore; là, une illustration opaline; là-bas encore, une figure de style sertie de diamant. Chapelet de pierres précieuses enfilées les unes à la suite des autres sur un fil d'or, on ne peut arrêter son choix sur une seule pierre; toutes nous séduisent de leur symétrie et parfois asymétrie lumineuse. Et plus encore que la féérie individuelle de chacune, c'est cette sensation de légèreté transcendante rayonnant de l'ensemble qui lévite le lecteur dans un espace situé entre le matériel et l'immatériel, espace aérien et diaphane fait de romantisme mystique sensuel. “Si les livres saints me plaisaient toujours, c'était parce que je pouvais détourner le cours de leurs paroles et, juste avant qu'elles atteignent Dieu, courber leur trajectoire afin qu'elles filent vers le visage de Louise Amour et s'enflamment en traversant le bouclier de son sourire.”

Christian Bobin transforme sans conteste tout ce qui le touche ou l'a touché par le passé en trésor. Il possède ce don qui permet de voir et sentir ce que la majorité de l'humanité ne voit pas ainsi que celui de dessiller les yeux de l'imagination et de la vision de l'imperceptible de ceux qui l'accueillent. “ Plus que dans ses vêtements ou dans ses gestes, la force d'un homme, le tuteur invisible autour duquel s'enroule son âme, se voit, dans ses yeux”. Comment pourrait-on mieux décrire la force d'impulsion qui anime une personne et la maintient dans une direction comme le ferait un tuteur pour une plante, tout au long de sa vie ? L'image de l'âme enroulée autour de ce tuteur est tout à fait magistrale. Même l'inanimé palpite sous la plume de Christian : “J'entrai dans une petite cour pavée, bombée de silence gris.”

Ainsi que le déclare son propre personnage de Louise Amour, Christian Bobin a passé sa jeunesse à observer et à décrire. Il absorbait les scènes de la nature et en isolait l'essence pure, ce qui constitue aujourd'hui sa fibre distinctive en tant qu'écrivain. S'excluant lui-même des jeux des autres enfants, il préparait sa grande sensibilité de futur écrivain et contrairement à beaucoup d'artistes qui produisent à partir de la noirceur de leur vie, de leurs expériences et de leurs réflexions, il affirme avoir eu une enfance choyée et heureuse, entouré et aimé de ses parents.

Et comme bien d'autres l'ont énoncé auparavant, le seul reproche qu'on puisse faire à Bobin est de verser à la conclusion de Louise Amour dans un moralisme religieux exagéré. Mais si c'est là le prix à payer pour avoir le privilège de profiter des fruits de cet architecte du sublime eh bien, qu'il en soit ainsi.

Corail - Ottawa - 64 ans - 15 novembre 2008