Les dernières heures
de Ruth Druart

critiqué par Missef, le 4 décembre 2022
( - 58 ans)


La note:  étoiles
Paris libéré, mais Paris bien amer : que d'émotions!
Résumé de l'éditeur:
À l'aube de la Libération, Paris vit ses heures les plus sombres. Mais la jeune Élise n'hésite pas à braver les dangers et à partager le peu qu'elle possède avec un orphelinat juif. Affamée de justice, elle va encore plus loin, exfiltrant les enfants avant qu'ils ne soient envoyés au camp de Drancy. Un jour, elle fait la rencontre de Sebastian, un jeune soldat allemand. Chaque jour, pour le Reich, il traduit les lettres de dénonciation. Mais sa rencontre avec Élise va le confronter à l'horreur de ses actes et à un terrible dilemme : trahir son pays ou renoncer à l'amour de la belle Française. Dix-neuf ans plus tard, une jeune femme, Joséphine, découvre dans une vieille valise, une lettre qui remonte à la guerre. Un mot d'amour destiné à sa mère mais écrit par un autre homme que son père. Peu à peu, elle remonte le fil d'une histoire d'amour interdite. L'histoire d'une trahison et d'une vérité indicible qui va changer sa vie à tout jamais.


Mon avis:
J'avoue avoir un faible pour les romans historiques, mais cet amour est parfois mal payé car les auteurs se contentent trop souvent de plaquer un schéma narratif convenu sur telle époque ou telle autre, indépendamment des spécificités de l'époque concernée. Je redoutais ce cas de figure avec Les Dernières heures mais, poussée par les bonnes critiques lues ici et là, je me suis laissé tenter. Et j'ai eu raison.
Ce qui arrive à Elise et Sebastian dans ce roman n'aurait jamais pu se produire à une autre période. L'auteure a su bâtir son intrigue en fonction des caractéristiques propres à la fin de la Seconde Guerre mondiale en France, à l'Epuration et aux Trente Glorieuses. L'auteure a réussi à faire vivre notamment le Paris libéré, mais amer et plein de rancœur. J'ai rarement eu l'occasion de lire une scène de tonte vécue du point de vue de la martyrisée, par exemple.
S'il y a quelques longueurs par ailleurs, l'ensemble est très agréable à lire et plus d'une fois j'ai eu la larme à l'œil. Et je ne parlerai pas de la tension émotionnelle que l'auteure a su ménager jusqu'au bout, par souci de ne rien divulgâcher.
Libération, épuration… 9 étoiles

Les romans autour de la Seconde Guerre Mondiale abondent, ces derniers temps, sans doute en raison de la facilité avec laquelle on y détermine le camp des gentils et celui des méchants. « Les Dernières Heures » présente le mérite d’inviter le lecteur à considérer la situation comme moins évidente, non que le livre cherche à dédouaner les nazis, loin de là, mais parce que ce roman nous permet une immersion, via les personnages d’Élise et Sebastian, dans une réalité vécue où l’on a bien du mal, en réalité, à savoir comment se comporter.
1944, Élise, jeune Française vivant avec sa mère et sa petite sœur, étouffe dans cette existence faite de peurs, de compromissions, de privations et d’humiliations. Elle tombe amoureuse de Sebastian, jeune interprète allemand auprès des autorités nazies, lui-même de plus en plus mal à l’aise et sceptique vis-à-vis de son camp. Comme ils se rencontrent dans les derniers mois de la guerre, l’auteure nous donne à voir ce que l’on voit rarement dans la littérature de fiction concernant la période : la libération de Paris et les semaines confuses qui se sont ensuivies, entre joie, règlements de compte, justice expéditive… C’est haletant et on vibre au gré des désespoirs des personnages dont l’histoire personnelle se retrouve piétinée par la grande Histoire, bien peu soucieuse d’entrer dans la compréhension des motivations et des contraintes pesant sur chacun d’eux.
Une belle réussite pleine d’émotions !

Reginalda - lyon - 57 ans - 15 janvier 2023