Cosaques Blues
de Érik L'Homme

critiqué par Kostog, le 22 novembre 2022
( - 51 ans)


La note:  étoiles
Armé guidon
Si vous avez acheté le dernier Erik L’Homme pour la jaquette de couverture, c’est que vous avez l’estomac bien accroché. Les éditions Calmann-Lévy ont-elles des penchants suicidaires, des stratégies tout à fait non conventionnelles pour faire fuir le lecteur ? La question se pose. A moins que ce peinturlurage ne vise à envoyer un gros crochet du droit dans l’estomac du chaland qui aspire à échapper aux inévitables mètres linéaires des prix littéraires. La méthode est osée, mais, qui sait ?

Pour ma part, j’avais franchi le pas. me fiant de façon tout à fait exceptionnelle aux critiques journalistiques, moi qui ne jure d’ordinaire que sur les avis bien sympathiques de mes co-critiques de Critiqueslibres. La jaquette ayant fait les ravages que l’on sait, l’un de nous se devait de se jeter à l’eau.

Ayant franchi le Rubicon, je découvre une joyeuse bande de motards, les Childs of Armageddon - eh oui, fallait oser -, menés par une Brienne De Torth, pardon une Dolorès, matrone attentive mais à la poigne redoutable. La bande, qui ne brille pas particulièrement par ses ressources intellectuelles, pour mettre un peu de beurre dans les épinards est spécialisée dans les « braquages festifs ». La dernière opération a pour cible une fourgonnette remplie d’armes qui, malheureusement pour eux, appartient à une grosse société multinationale dont les dirigeants ont un goût très limité pour l’attaque à main armée divertissante quand elle s’effectue à leurs dépens.

Suit une succession de péripéties qui entraînent dans leur sillage une poignée de malchanceux ayant mis les doigts là où il ne fallait pas: un hacker encore puceau, un faux voyant, vieil égoïste échoué sur le rivage du je-m'en-foutisme de sa génération, une escort-girl courageuse, une ancienne révoltée des Bonnets jaunes que le pouvoir a réussi à éborgner, et deux doux rêveurs voulant créer un royaume qui échapperait à la sinistrose.

Erik L’Homme mène son récit avec brio, aidé par une prose facétieuse. Ce qui est avant tout une chronique de la France qui perd, déjà ébauchée dans Déchirer les Ombres, ne sombre à aucun moment dans la mélancolie. Elle est transformée par une veine comique qui convainc qu’il vaut mieux faire montre d’un peu, beaucoup, passionnément de folie que de sombrer dans l’apathie et la consternation.