La Petite Menteuse
de Pascale Robert-Diard

critiqué par Bernard2, le 22 septembre 2022
(DAX - 75 ans)


La note:  étoiles
Cas de conscience
Alice est avocate. Elle accepte défendre en appel Lisa, qui a été victime d'un viol, l'accusé ayant écopé de dix ans de prison.
Au fur et à mesure des entretiens entre Lisa et Alice, la personnalité, particulièrement trouble, de la victime, se dévoile. Jusqu’au moment où Lisa avoue à son avocate qu'elle a menti. Elle consigne ses aveux par lettre. Cette révélation est faite assez tôt dans le livre, et l'autrice a voulu qu'elle soit connue dès le début de la lecture, le titre est sciemment choisi pour cela.
Alice, qui au départ de l'affaire devait défendre Lisa contre son agresseur, se trouve amenée à la défendre contre elle-même.
Attention, le texte est parfois brutal, cru, le thème s'y prête. Au fur et à mesure que l'on avance dans cette lecture on réalise combien les jugements que l'on peut porter sont parfois bien péremptoires et qu'il convient d'analyser soigneusement un contexte avant de décider quoi que ce soit. Ce roman, bien écrit, est aussi une leçon de sagesse.
Une fiction contemporaine, réaliste et passionnante 10 étoiles

Un très bon choix pour le Goncourt des lycéens qui ne se sont pas trompés , ainsi que pour d'autres prix. Je ne répéterai pas le résumé déjà complété dans les deux critiques précédentes. Il n'y a en effet pas de risque de spolier l'intrigue puisque le le titre évacue d'emblée tout suspense sur l'issue du procès . L'intérêt est dans le pourquoi et le comment.
Nous avons le portrait de deux types d'avocats . L'héroïne du roman , Alice , progresse vers l'empathie avec sa cliente ce qui lui permet de comprendre peu à peu le comportement de celle-ci quand elle était adolescente . La deuxième étape de son travail est de conduire les jurés et la présidente à faire ce même cheminement et c'est du grand art de sa part. L'autre avocat fait partie d'une génération majoritairement masculine, habituée à déclamer sans micro et à jouer des effet de manche . Il vibre plus en défense de sa propre vision des choses , heurtée par un néo féminisme agressif , et qui voit dans ce procès une sorte de revanche. C'est aussi la complexité des situations qui explique le désastre que la jeune victime subit et auquel elle contribue et qu'elle aggrave. Par exemple le père était le plus capable et désireux de comprendre , douter , et aider sa fille , mais son propre sentiment de culpabilité , au sein de son couple et de sa famille a inhibé l'action décisive qu'il aurait pu avoir. Chaque acteur du drame amplifie la catastrophe et l'adolescente ne pouvait plus reculer. (D'ailleurs l'auteur fait une allusion au procès d' Outreau , qui a vu des enfants surajouter des accusation de pédophilie envers des adultes innocents)
Une cause fréquente d'erreur judiciaire tient probablement au fait que le prévenu , ou un témoin , a quelque chose d'autre à cacher et pour cette raison ne fournit pas le bon témoignage , ou pire ne se défend pas correctement . Rectifier le tir dans un deuxième temps est toujours plus compliqué et génère des suspicions.
Au delà de la psychologie , la narratrice nous montre tout ce que son métier , comme d'autres , comporte prosaïquement de techniques , de procédures , de tactiques et de stratégie . C'est peut-être aussi cette ossature qui permet de prendre en pleine face des réalités humaines très dures.

Nav33 - - 76 ans - 22 juillet 2024


Intime conviction 7 étoiles

Lisa Charvet demande à l’avocate Alice de la défendre dans un procès en appel. En première instance il y a cinq ans, l’homme qu’elle a accusé de l’avoir violée alors qu’elle avait quinze ans a pris dix ans de prison. Alice accepte cette affaire et très vite Lisa lui avoue qu’elle a menti. Cette adolescente perdait pied...
Alice démonte tout le processus qui a mené à l'accusation erronée lors du procès et tente d’expliquer l’enchaînement.
Ce livre se lit rapidement, d’une traite. L’auteure démontre toute la complexité d’un jugement, l’ambigüité des bonnes intentions, la part de culpabilité qui peut se jouer dans une conviction intime, sans parler de la vulnérabilité de l’adolescence. La fin n’est pas écrite, mais je me suis demandée, techniquement parlant, pourquoi l’avocate devait défendre la personne initialement désignée comme victime alors que ce n’est pas son procès.

Pascale Ew. - - 57 ans - 24 mai 2024