L'étoile de la rédemption
de Franz Rosenzweig

critiqué par Sahkti, le 4 octobre 2004
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Affronter l'angoisse
Lecture ardue que celle-ci, qui demande pas mal de recherches complémentaires et surtout une période de réflexion entre les chapitres pour tenter d'en comprendre l'essentiel.
Lecture ardue mais ô combien intéressante.
Il y a d'abord le contexte de l'écriture à prendre en compte. Comme le dit Stéphane Mosès dans la préface, cet ouvrage "porte clairement la marque de l'époque qui l'a vu naître". Cette époque, c'est celle de la guerre 14-18, de l'horreur, de la prise en compte radicale de la barbarie humaine et de ces fantômes avec lesquels l'Humanité devra désormais vivre. Au diable l'idéalisme qui refuse de voir la mort, l'Homme ne vit qu'à travers l'angoisse de celle-ci, il est temps de le comprendre et de ne jamais perdre de vue cette notion qui modifie complètement les courants rationnalistes de la pensée chers à quelques philosophes.
L'homme est un être composé de chair et de sang, d'émotions, qui vit sa vie de manière concrète et non théorique; Rosenzweig demande à la philosophie de descendre dans l'arène. Quelle solution propose-t-il pour ce faire? Le retour vers le religieux. Ha cet éternel retour vers la religion quand les choses vont mal ou que le monde doit se remettre en question. Rien de neuf sous le soleil, nous le vivons encore cruellement aujourd'hui, jusqu'aux formes les plus misérables de l'intégrisme.
Après la guerre, de nombreux juifs allemands se sont convertis au christianisme. Rosenzweig aurait pu faire de même, il aurait mis en pratique une partie de sa théorie, mais il ne l'a pa fait et explique ici pourquoi. Juif ou chrétien, les deux vivent de la même manière la "Révélation", cette force libératrice selon Rosenzweig qui porte l'homme et le transfigure.

J'avoue avoir quelque peu décroché au milieu de ces notions religieuses. Si les théories de Rosenzweig à propos de la survie de l'âme après une guerre et de son impossibilité à ne vivre que dans la seule rationalité (la guerre rend la mort concrète et donc l'angoisse aussi) rencontrent mes convictions, il n'en va pas forcément de même pour la révélation que constitue la religion, quelle qu'elle soit. J'approuve par contre complètement son souhait de révolutionner la philosophie et de la rendre plus proche de la réalité, n'imposant plus ses théories à l'Homme mais adaptant ses notions en fonction de celui-ci. Je ressens également de l'admiration pour ses convictions profondes qui le poussent à rester ancré au judaïsme plutôt que se convertir au christianisme. Beaucoup de force et de sincérité chez Rosenzweig, tout comme dans son oeuvre.