Le chemin des estives
de Charles Wright

critiqué par Jfp, le 22 août 2022
(La Selle en Hermoy (Loiret) - 75 ans)


La note:  étoiles
clochards célestes
Comme nous l’apprend l’auteur, l’entrée dans l’Ordre des Jésuites commence par un noviciat au cours duquel le futur prêtre doit se dépouiller (pour un instant) de toute richesse et de tout attachement aux biens matériels. Il va donc devoir parcourir les chemins sans argent ni aucun moyen de communication, en compagnie d’un autre novice plus avancé que lui dans son parcours initiatique mais qu’on ne lui a pas laissé la possibilité de choisir. Une mise à l’épreuve matérielle et humaine qui décidera, ou non, de la fermeté de sa vocation. C’est ce cheminement que nous conte Charles Wright, une traversée d’ouest en est, pendant un mois, du Massif Central, en pleine période de canicule. On souffre, de la chaleur, des pieds, du manque d’hygiène, de la faim parfois lorsque les portes se ferment car il faut trouver chaque jour sa pitance et de quoi s’abriter pour la nuit. Une traversée de la France profonde qui n’est pas sans rappeler la traversée des "territoires de l’hyper-ruralité" effectuée, pour des motifs bien différents, par un certain Sylvain Tesson ("Sur les chemins noirs"), écrivain-voyageur avec lequel l’auteur partage un goût très prononcé pour les mots rares et les citations. Mais la comparaison s’arrête là même si la zone traversée est en grande partie la même et si tous les deux ont été confrontés à la détresse économique d’une région éloignée des grands bassins d’activité agricole et industrielle. Ici, le cheminement est avant tout intérieur, propre à la méditation face à une nature omniprésente et des populations variées, souvent en souffrance mais capables aussi d’une profonde aménité. Nos deux compères vont apprendre, parfois à leurs dépens, que l’accueil du pèlerin n’est pas, et de loin, l’apanage des croyants, bien au contraire, et n’a pas grand-chose à voir avec le fait d’être riche ou pas. Une belle leçon de vie, que chaque lecteur recevra, en fonction de sa propre personnalité ou son vécu, comme un message d’espoir ou bien un constat accablant. Un très beau livre, écrit avec une profonde sensibilité. On pardonnera à l’auteur quelques confusions, entre l’est et l’ouest au tout début de son parcours, ou encore entre les pécheurs et les pêcheurs. Cela fait sourire mais ne nuit guère au plaisir de la lecture…