Haïkus Bleus et verts
de Véronique de La Boulaye

critiqué par Débézed, le 23 juin 2022
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Poésie aux couleurs de la nature
Avant de me lancer dans la lecture de ce recueil de haïkus, j’ai relu la chronique que j’avais rédigée après avoir lu l’ouvrage que Iocasta Huppen a consacré à la poésie brève japonaise, « Poésie brève d’influence japonaise », édité à L’Harmattan. Iocasta est une haïjin de talent, roumaine d’origine, elle vit en Belgique, j’ai eu la chance et le plaisir de lire plusieurs de ses recueils et ainsi de me familiariser un peu avec ce type de poésie. C’est donc avec une certaine impatience, une véritable envie de découvrir ce recueil, que j’ai abordé sa lecture. J’y ai trouvé de très jolis haïkus qui appartiennent à la famille des haïkus écrits sur trois lignes et qui doivent respecter des règles très précises que j’ai, hélas, oubliées.

Avant d’écrire des haïkus, Iocasta invite les auteurs à « … garder à l’esprit l’idée que cette écriture se fait en employant un langage simple et des mots simples. La simplicité a un pouvoir universel, celui de s’adresser directement à l’esprit ». J’ai trouvé que Véronique respectait très bien ce principe de simplicité qui est à l’origine de l’élégance de cette forme poétique, de sa douceur, de sa poésie, de la sérénité qu’elle dégage, des images qu’elle forme avec quelques mots seulement. J’ai été immédiatement emballé, dès la lecture du haïku qui introduit le recueil :

« Dieu créa la femme / puis donna vie à l’homme / pour qu’ils puissent jouer // Mais l’homme pleura tant / de n’être pas né le premier / que Dieu prit pitié // Il fit croire à l’homme / qu’il avait été créé / premier des humains ». La forme courte est toujours très efficace, je n’ai peut-être jamais lu un aussi joli et convainquant texte féministe !

Dans ce recueil, Véronique évoque surtout la nature et ceux qui la peuplent qu’ils appartiennent au monde végétal ou au royaume animal :

« Ajoncs mimosas / Tiges de saules osier / janvier jaune dans l’île »,
« Venu à la nage / un sanglier est dans l’île / la légende commence »,
« Un merle dans l’arbre /attend-il le merle blanc / d’Alfred de Musset ? ».

Mais elle s’autorise aussi quelques petites excursions, à Venise notamment où elle a trouvé une belle matière pour nourrir son œuvre :

« Sur la pointe des pieds / je longe le Grand canal / crainte de submersion ».

Ou encore au bord de la mer :

« Porté par les vagues /et divaguant dans les algues / un rêve vagabonde ».

Véronique nous a convaincu, une fois de plus, que la forme courte est une des plus belles expressions littéraires et que sa concentration exprime les plus jolis sucs de la langue qu’elle utilise. J’ai choisi de conclure sur cette strophe qui m’a parue pleine de douceur et de poésie :

« Alcôve marine / flux et reflux de fleurs blanches / adieux à l’amie ».