Kill jekyll
de Corinne Lovera Vitali

critiqué par Débézed, le 13 juin 2022
(Besançon - 76 ans)


La note:  étoiles
Des amours faillibles
Quand j’ai découvert cet ouvrage, je me suis souvenu d’un recueil de textes courts que Corinne avait publié chez Louise Bottu éditions en 2016, il me semble. Ces textes évoquaient sa relation avec son père, la vie qu’il avait pu avoir entre les soixante-dix-huit ans qu’il avait au moment où elle écrivait et les trente-neuf ans qu’elle avait à ce même moment. Dans ce nouveau recueil, elle propose sept textes, presque des nouvelles mais plutôt des récits, des tranches de vie, évoquant des couples plutôt improbables, au moins pas très ordinaires, souvent dans des situations particulières comme on peut le constater ci-dessous à travers mes brefs résumés.

Le récit de la relation entre Antoine, jeune handicapé en fauteuil roulant qui rêve de visiter Naples où Maradona est l’idole de toute la ville, et de Claude, son ami, qui, lui, a visité Naples seul incapable d’assumer le handicap de son ami. Antoine n’a pas pu résister à cette trahison…

L’histoire d’une traductrice qui accompagne un expert chez les agriculteurs pour les inciter à des pratiques culturelles plus écologiques. Ils couchent au gré de leur périple dans la campagne, parfois dans le même lit, mais l’expert ne veut absolument pas d’une relation sexuelle avec elle malgré tous les efforts et les artifices qu’elle dépolie.

Le récit des aventures d’un homme qui aime Amy à la folie mais qui ne peut pas s’empêcher d’aller voir comment est l’herbe ailleurs, plus verte peut-être, plus excitante, plus savoureuse, plus ... plus …, il ne sait pas trop car ses aventures restent toutes éphémères.

L’’histoire, un peu fantastique, d’un gars qui rêve qu’il est serait le fils que Clint Eastwood si celui-ci n’avait pas obligé sa femme à avorter. Une histoire un compliquée d’un gars qui s’incarne dans la peau d’un homme qui n’est jamais né.

Le récit de la déprime de Louise, elle ne croit plus en l’avenir et pas plus en sa vie actuelle. Elle ne veut plus de relations sexuelles, elle repousse son conjoint qui la trompe sans vergogne aucune avec des jeunes filles dont certaines sont encore en fleur. Il trouve dans ces nouvelles aventures des sensations qui le conduisent à une véritable obsession pour le sexe.

Un bouseux persuadé qu’il ne trouvera jamais une femme à qui il pourrait plaire et qu’il restera donc célibataire à jamais, se laisse aller au fond de sa campagne perdue. Et, pourtant il rencontre Sylvia dont il tombe amoureux. Il s’aime en s’engueulant régulièrement. Elle ne veut pas d’enfant, il ne le supporte pas, craque, au moment où l’orage se déchaîne détruisant tout juste comme un étranger qui semble connaître Sylvia arrive à la maison…

Deux veufs meublent ensemble leur temps car ils ont perdu tous les deux leur compagne dans des circonstances très différentes. Et, pourtant Robert ne supporte pas Joe qui a été malhonnête avec son épouse. Cette histoire fort romanesque le conduit a préféré la compagnie de Mitchum, son chien, à celle de son détestable ami mais aussi avec Cecilia une jeune fille à qui il voudrait apprendre à conduire…
Corinne écrit des récits très contemporains dans une écriture très élaborée, très riche, souvent recherchée et d’une grande précision. Il est donc très difficile de résumer ces sept textes dans lesquels elle évoque les failles et les ruptures qui rendent très improbables les amours pérennes. Elle sonde ses personnages jusqu’au plus profond de leur cœur et de leur âme, mais elle évoque surtout la part charnelle, animale, reptilienne qui entrave souvent les relations amoureuses. Je n’ai donc pu qu’esquisser les textes de Corinne dans lesquels, je n’ai pas vu, comme je l’ai déjà écrit, que des nouvelles mais plutôt une première démarche vers la création romanesque. A la lecture de ces récits, J’ai eu l’impression qu’elle cherchait son chemin vers l’écriture d’un roman profond, très contemporain, un texte sur l’impossibilité de vivre un amour pour toujours.

Elle aime l’Ecosse dont plusieurs de ses personnages sont issus et le cinéma, Clint Eastwood, Robert Mitchum qui prête son nom à un chien, …, Ces évocations de le lande écossaise et des films joués par ces grands acteurs donnent un caractère encore plus visuel aux textes de Corinne.