La vie est ailleurs
de Milan Kundera

critiqué par Drclic, le 23 septembre 2004
(Paris - 48 ans)


La note:  étoiles
A travers Jaromil
Nous découvrons l'enfance et l'adolescence de Jaromil. Roman subversif où les personnages et les lieux ne servent que de décors et d'acteurs à la vie.
Vous pouvez apprécier ce roman comme une belle histoire mais il vous faut vous investir un peu plus dans cette oeuvre pour apprécier le génie de Kundera.

Ce roman est subversif plus insidieusement que les autres. Sur le fond, il l'est mais sur la forme, il se joue de nous.

A lire "sérieusement". ;-)
Drclic.
Ce n'est pas, oh que non, que l'histoire d'un poète 10 étoiles

En ouvrant un roman, on découvre un "héros", un personnage qui va naturellement susciter notre sympathie pour parfois la perdre au gré de ses errements et de sa médiocrité. C'est mon avis sur Emma Bovary.

Puis Kundera nous invite à réfléchir sur le fait de savoir si le narrateur omniscient ne nous dresse pas un tableau embelli sur un personnage somme toute banal : un poète médiocre se croyant choisi par la providence pour accéder au génie qui imole sa conscience pour l'idéologie, ou plutôt pour sa vanité personnelle.

Nous avons ici un personnage vaniteux, narcissique, pensant que la vie est ailleurs et que cette vie mérite quelques sacrifices, surtout si c'est les autres qui en sont les pourvoyeurs.

Ce personnage sert de réflexion sur le fonctionnement des systèmes totalitaires (à l'époque, en Tchécoslovaquie, on ne rigole pas), sur l'identité, sur l'amour, sur la poésie bien sûr.

Et surtout nous avons, à la façon de Diderot une admirable réflexion sur le Roman et sur le point de vue, où l'on voit que, quand le personnage devient inutile ayant réconté son histoire, on le romancier se donne la liberté de le jeter en l'éliminant d'une mort absurde et ridicule.

Fa - La Louvière - 49 ans - 8 janvier 2015


un auteur d'une intelligence et d'une lucidité remarquables 10 étoiles

La vie est ailleurs, quel beau livre au titre si suggestif. Pour Jaromil héros de ce roman la vie est un long poème dans lequel des vers sont enfouis et cachés dans chaque situation de sa vie, de l'aquatique amour en observant une nounou à travers la serrure de la porte de la salle de bain à la révolution communiste en Tchécoslovaquie. Mais qu'est ce que la vie? L'Histoire peut-elle influer et transformer une vie en mettant tous les espoirs, les révoltes et les désirs dans le coeur des jeunes adolescents? Telle est la question posée par le roman qui dénoue et étudie ses personnages par l'intérieur et leur intériorité. Chacun garde en lui ses secrets et ses pensées inavouables qui créent une incompréhension au sein des relations: la mère qui n'ose pas avouer à quel point elle est possessive et jalouse de son fils quand il se lie à une jeune fille, le fils qui profondément introverti a déjà compris que les relations humaines servaient de prétexte à l'existence et qui tente de déceler la poésie dans les situations quotidiennes. La poésie peut-elle sauver du désespoir en a t-elle les moyens matériels ou s'agit-il d'une ode à la vie et à l'humanité dans laquelle on transmet nos pensées nos doutes nos passions ?
Des questions récurrentes qui surgissent dans ce livre époustouflant et lucide qui montre toute la complexité des relations humaines et du passage difficile de l'enfance et l'adolescence, ce basculement si bien décrit par l'auteur dans lequel on est propulsé soudainement quand on se rend compte qu'il y a eu des non dits, des tentatives de dissimulation et qu'on prend pied dans le monde des hommes. Tous les doutes et les pensées qui peuvent envahir un être humain au cours d'une vie et des scènes de sexualité qui interviennent avec la rousse, le plaisir physique qui peut permettre d'oublier notre condition, l'Art qui peut sauver du désarroi de la peur, le nouvel Art Moderne qui prend le dessus sur l'art traditionnel. C'est à la fois le basculement d'un héros et d'une époque qui sont décrits avec une intelligence et une lucidité étonnantes. L'auteur se joue de nous pour nous montrer à la façon de Diderot que le romancier a toujours le pouvoir sur le lecteur et il nous introduit directement dans les coulisses de l'écriture en changeant son point de vue sur son personnage en changeant de pavillon comme il dit, en changeant de protagoniste pour divulguer à quel point le romancier est un magicien de mots qui s'amuse du lecteur pour mieux le ramener à la réalité qui réserve sa part de vérités invisibles à l'intérieur de nous humains. Chaque personnage a son histoire et même les personnages secondaires sont travaillés, le romancier capte, il capte des choses qui ne sont pas perceptibles à première vue et il en fait oeuvre d'art, mais les poètes souffrent de leur lucidité, ils ont l'impression d'être les seuls à avoir découvert autant de vérités cachées, pourtant ils ont le monde sur leurs épaules. La capacité de l'être humain à inventer sa vie est flagrante, il se compare toujours à l'autre, à ce qu'il connaît puis il revient peu à peu ses sources il revient au foyer maternel après avoir découvert le monde, il revient déchu, souffrant faute de trop de lucidité et de sensibilité.
Une ode à l'art, une interprétation du monde social et de notre monde intime sans jamais décrire mais en mettant les personnages en action. Qui sommes-nous et que sommes-nous venus faire sur terre? La littérature a des réponses ou du moins des tentatives de réponses qui permettent l'interrogation, le doute, sans l’interrogation l'homme va dans l'erreur...

Kian996 - - 28 ans - 27 octobre 2013


Un premier Kundera 6 étoiles

Ca y est, j’ai enfin osé entamer l’œuvre de Kundera. Kundera fait partie pour moi des écrivains dont je me dis que la lecture risque d’être complexe et qu’elle ne vaudra par conséquent pas forcément le coup, car la complexité ne laisserait pas place à l’évasion ou la distraction. Avec des titres comme « L’insoutenable légèreté de l’être », Kundera pour un lecteur non averti comme moi frise plus la pédanterie que la poésie.
Mais ne laissons pas la place aux préjugés, ne nous laissons pas influencer par ces professeurs et étudiants de faculté littéraire qui hérissent Kundera au sommet de la « classe » littéraire. Alors lorsque j’ai vu ce roman dans une brocante à 50 centimes, je me suis dit que c’était enfin l’occasion de rencontrer Kundera, avec qui plus est une œuvre non majeure.

Ma première réaction, après les 80 premières pages, fut plutôt une déception : c’est ça Kundera ? Son style ne m’a pas marqué, ni par sa beauté, ni par sa complexité, mais plutôt par sa banalité. L’histoire ? Elle se dresse autour d’un petit garçon, fils unique, qu’on prétend poète. Sa mère entretient une liaison adultère avec son professeur de peinture, et la relation mère-fils est assez étrange. Ensuite les autres parties se complexifient. J’ai eu du mal à faire des liens parfois, et je n’ai pas compris où Kundera voulait en venir ; et s’il voulait en venir nulle part, et bien ce n’est pas un écrivain pour moi.
Une préface (ou postface) aurait peut-être été bienvenue. Car malgré cette première lecture, Kundera reste pour moi toujours un inconnu, dont je ne sais toujours pas quoi penser.

Elya - Savoie - 34 ans - 14 août 2011


Un des meilleurs Kundera! 10 étoiles

J'aime beaucoup Kundera, mais là....j'ai vraiment trouvé cette oeuvre admirable et toute en subtilité.
Un pamphlet sur les dangers de la poésie et de son lyrisme dressé à partir de l'histoire de Jaromil le poète, le petit à sa maman (monstrueuse....du fait de l'immense amour qu'elle donne à son rejeton), évoluant dans un pays (Tchécoslovaquie) en pleine révolution communiste.
Jaromil est un idéaliste borné et dangereux, il est "innocent" mais il a un sourire "sanglant", ainsi son absolutisme condamne tous ceux qui diffèrent de lui et de la route qu'il a choisie, y compris sa petite amie...

Pepe - - 43 ans - 30 septembre 2008