Le sentiment du fer
de Jean-Philippe Jaworski

critiqué par Magicite, le 8 mars 2022
(Sud-Est - 46 ans)


La note:  étoiles
sentiments mitigés
Ce recueil comporte 5 nouvelles plus ou moins longues se déroulant dans le monde imaginé par l’auteur: Le Vieux Royaume.
C’est ma première (et seule) incursion dans ce monde et c’est peut-être pour cela que j’ai eu du mal à rentrer dans les histoires, particulièrement la première. Cela parlera peut-être mieux à quelqu’un connaissant les livres principaux.
J’ai découvert la description d’un univers à la croisée d’un moyen-âge de fantasy (avec sorcier et elfes) et d’une renaissance fantasmée pleine d’intrigues et de cynisme de différentes factions.

1) Le sentiment du fer:
Première nouvelle donnant son nom au recueil, la plus longue aussi.
Première surprise. Le style est recherché, très recherché et cela se ressent. Malgré une très belle écriture, j’ai ressenti pas mal de lourdeur à la lecture, ne serait-ce que parce que je butais sur des mots rares et que les formulations apparaissent parfois alambiquées.
Elle se concentre sur un voleur/tueur à gages et sa mission narrée en partie par le protagoniste: voler un grimoire dans une roue à livre à un chef d’empire alors que des guerres grondent autour.
Entre intrigues et quelques scènes d’action: infiltration habile et du combat/fuite précipitée face à un corps de garde sur les toits de châteaux forts c’est le point de vue du protagoniste qui est mis en avant pour mieux nous surprendre.
L’histoire et surtout son dénouement (les choses ne sont pas ce qu’elles sont) restent originaux et prenants, noirs et sombres (comme l’ensemble des récits et du monde).
Les codes du genre restent utilisés mais déformés et sublimés par l’écriture pour mériter une place de choix mais j’ai dû quand même faire des efforts pour aller jusqu’au bout en me demandant si les mots utilisés existaient vraiment (en fait si bien que je ne me rappelle plus le nom médiéval d’une roue à livre comme une grande partie des mots employés du quotidien de ce monde).

2)L’elfe et les égorgeurs:
Histoire assez courte. Bien qu’astucieuse et représentative des situations/péripéties possibles des jeux de rôle auxquels l’auteur est habitué, ce récit m’a fait sourire bien que je l’ai trouvé plus anecdotique qu’autre chose. Ce n’est pas plus mal pour quelqu’un qui serait familier de ce Vieux Royaume.
L’axe dès le début est mis sur la tromperie des elfes et après un prologue assez dispensable (qui a le mérite de poser quelques bases de l’univers et d’évoquer les factions dans ce monde où la guerre semble atteindre son paroxysme avant une conclusion) le récit commence vraiment.
Un elfe arrive après le pillage d’un château auprès des conquérants. Des pillards que l’on ne sait pas trop mercenaires, rebelles ou simplement opportunistes dans la guerre. Ce n’est pas très important par rapport au récit.
Cet elfe au milieu des vainqueurs, soudards vulgaires, à l’allure frêle, est rapidement désigné comme leur victime. Sauf que c’est une sorte de noble troubadour. Un ménestrel, un conteur qui va leur parler de son art et sa quête de l’histoire qui fera de lui un maître à la cour des elfes.
L’astuce et la bravade contre la force va petit à petit inverser les rôles.

3 et 4 ne seront pas commentés

5)La troisième hypostase:
Ici les personnages me semblent des personnages récurrents d’autres histoire plus principales. Ce n’est pas trop dérangeant en méconnaissance de ce contexte. L’axe et la magie et pouvoirs d’une sorcière ayant lié son âme à des elfes et possédant une sorte de division de son âme en un autre être détaché et flottant hors de son corps, lui conférant des pouvoirs surnaturels et une sorte d’immortalité (la seconde hypostase probablement bien que je ne soit pas sûr de ce que veuille dire le terme). C’est sur le départ des elfes en bateau et l’assaut du protagoniste par des forces maléfiques que la conclusion arrive. Mêlant des visions de guerres en cours et la mort du maître et amant elfe vue par une sorte de télépathie magique et l’apparition des forces ennemies dans un combat intérieur. Cela est cohérent et compréhensible (plus que mon résumé pataud en tout cas), intrigant et clairement doit être plus intéressant en connaissance des récits principaux. Toutefois c’est quand même bien passé et le style riche (trop?) est moins appuyé que dans la première nouvelle ou alors je m’y suis habitué à la lecture des précédents récits.
La fin, comme la plupart des autres nouvelles du recueil, est entre dilemme moral et fidélité aux valeurs des protagonistes.

Une bonne découverte bien que fastidieuse, en tout cas un auteur qui mérite le coup d’œil dans un paysage où le succès populaire du genre fait la part belle aux poids lourds à l’aspect industriel/commercial de qualité littéraire bien moindre (de Harry Potter aux films inspirés de Tolkien et autres Games of Throne/trône de fer).