La mangrove du désir
de Denise Bernhardt

critiqué par El Gabal, le 26 janvier 2022
(Strasbourg - 35 ans)


La note:  étoiles
Érotisme et sensualité
Aujourd’hui, je voudrais vous entretenir au sujet de la grande poétesse Denise Bernhardt et de son œuvre qui recèle des trésors de sensualité et d’érotisme les plus purs. Lyrique comme le sont nos muses proches et lointaines à la fois, Denise possède cette force scripturaire qui la préserve d’une forme de sentimentalisme artificiel et banal qui transforme l’amour en élément et événement à la fois profanes, et banals alors que toute son essence est sacrale. La sève de ses mots semble avoir été extrait de la majesté des plus beaux arbres fruitiers, où de cette mangrove qui donne son titre au recueil et où le désir fait loi jusque dans le monde végétal :

« Par l’espace azuré
Qui m’ouvre les bras,
Les jardins embaumés,
Les feuillages épais
Où bruissent les fontaines,
J’irai à ta rencontre. » (p. 90)

L’amour recouvre son droit à élever corps et âmes au sein de notre vaste univers. Tout semble fluide; y compris le voile qui recouvre Éros et qui le dissimule à Artémis. Le mystère prédomine en même temps que cette clarté solaire dont Apollon fut le dieu. Et même lorsque Denise abdique, elle gagne en courage et en beauté du verbe. Voici pourquoi les principaux visages de l’amour nous sont dévoilés. Non pas pour que nous le reinventions, mais tout simplement pour lui donner naissance.

Bien rares donc sont les recueils aussi puissants que ceux de Denise. Ils lui offrent une place incontestable parmi les grands poètes de notre temps. Ils nous instruisent comme le ferait Socrate au moment du banquet. Et ils nous aident à panser nos blessures de coeur. Denise en sort triomphante, comme gagnée par cette sagesse, directement héritée de Salomon, qui n’ôte rien à l’éclat de la passion. Sa grande maîtrise verbale impressionne en même temps qu’elle forme une parfaite invitation au voyage.

Et si nous devions relire des psaumes, je dirais qu’il importe de lire ceux de Denise dont l’extrême délicatesse forme la parfaite antithèse à ce monde trop souvent gagné par la haine.

« Je cueillerai pour toi
Les plantes gorgées de lune
Mêlées aux écorces souveraines.
J’appliquerai sur tes blessures
Les baumes oubliés
Et les herbes anciennes » (p.112)

Alors que vive la poésie de Denise et de tous les héros d’amour ! Ensemble, nous guérirons de nos blessures et nous réapprendrons le véritable sens de l’amour qui se situe bien au-delà des mots. Quelque part entre les caresses délicates et les baisers langoureux. Tel est le sens de l’écriture de cette grande poétesse qui aura su créer et transcender sa propre légende !

Julien Miavril