Le testament de Monsieur Napumoceno da Silva Araújo
de Germano Almeida

critiqué par SpaceCadet, le 3 août 2021
(Ici ou Là - - ans)


La note:  étoiles
Quand la rigide vertu cache une imparfaite humanité
Peu traduite, la littérature capverdienne figure parmi les nombreuses méconnues des ‘lettres venues d’ailleurs’. Dans un tel contexte, on peut estimer qu’étant l’un des rares ouvrages à avoir bénéficié d’une traduction en plusieurs langues, le premier roman de Germano Almeida est sans doute parmi les plus connus chez les amateurs de littérature étrangère. Malheureusement, aussi prometteur qu’ait pu sembler ce roman, à l'égale de ce que l'on peut observer chez une petite poignée d'autres auteurs capverdiens, sauf erreur aucune des autres publications qui l’ont suivi ne semble avoir été traduite en français. On se demande un peu pourquoi d’autant que, couronné par le prestigieux prix Camões en 2018, il semble bien que les œuvres de Monsieur Almeida aient été appréciées par les lecteurs lusophones.

Prétexte à portrait, ‘Le testament de Monsieur N…’ s’ouvre donc au moment où réunis chez le notaire, un petit groupe de personnes concernées assistent à la lecture dudit testament. Rédigé dix ans plus tôt (soit en 1974), le document, qui compte 387 pages, s’avère être une sorte d’autobiographie faisant état des principaux événements ayant marqué l’existence de cet homme. Ecrit avec plus ou moins de complaisance et avec plus ou moins de fidélité à la réalité, le fameux testament n’en révèle pas moins une personnalité que d’aucuns n’auraient imaginé. C’est ainsi qu’à l’instar de Maria (une héritière) nous partons à la découverte d’un homme dont le côté ‘pile’, méconnu, voire insoupçonné chez ce respectable ‘self-made man’, nous est éventuellement révélé.

Bien que datant d’une trentaine d’années ce roman publié en 1989 nous ouvre donc une petite, une toute petite fenêtre sur cet archipel, colonie portugaise jusqu’en 1974, sis au large des côtes du Sénégal.

Au fil des neuf chapitres qui le composent, dans un contexte brièvement évoqué, outre le personnage principal, nous croisons une galerie de personnages issus de divers milieux, puis effectuant quelques aller retours dans le temps, l’auteur dresse avec humour et empathie un mini portrait de société couvrant succinctement les deux premiers tiers du XXe siècle.

Evoluant de façon non linéaire, la narration suit un fil dont la logique m’a semblé tenir plus de l’association d’idées que d’un enchaînement d’événements, d’une évolution dans le temps ou d’une exploration thématique. Ce procédé donne lieu à une suite de petites scènes, certes reliées entre elles, mais au long desquelles la direction adoptée par l’intrigue semble incertaine.

Près de l’oralité, la prose est simple, fluide et s’accorde plutôt bien avec le style de narration.

Quelques scènes ou manifestations érotiques dont l’écriture m’a paru assez bien maîtrisée, viennent pimenter le récit (soulignons cependant la présence dans ce roman d’un passage évoquant un viol dont la description et le traitement pourrait choquer certains lecteurs).

Sans être remarquable, voilà un premier roman plutôt bien conçu, court, facile à lire, plutôt amusant, mais qui m’a laissé sur ma faim.


Note : soulignons que ce roman a fait l’objet d’une adaptation pour le cinéma, réalisé par Francisco Mans, le film (disponible en VO portugaise) est sorti 1997.