Le serpent majuscule
de Pierre Lemaitre

critiqué par Radetsky, le 3 août 2021
( - 80 ans)


La note:  étoiles
La Tata flingueuse
Ceci est le premier opus de Pierre Lemaitre, resté jusque là dans ses tiroirs.

Dans cette saga improbable et loufoque, un duo de nostalgiques des Maquis de la Résistance où ils se sont battus avec vaillance et une estime réciproque (en fait un amour fou inavoué), se retrouve longtemps après que la vie les a séparés pour mener des existences bien ternes, au vu de ce qui avait précédé.
Que faire (air connu)...?
Au fond, leurs expériences "professionnelles" les plus notoires se trouvaient au bout du fusil, ou plutôt du pistolet, c'est plus discret et maniable. D'autant qu'on a le choix et les lecteurs curieux de la chose pourront trouver dans ce bouquin d'utiles études comparatives savamment "calibrées".

Donc Tata Mathilde rempile dans la peau d'une tueuse "pro", guidée à distance par son grand amour de toujours (et toujours non dit), Henri dit "le Commandant".
Au bénéfice de qui... ah, ah... on ne le dira pas ! Ce qui n'a d'ailleurs aucune importance....
Toujours est-il que la maison de Borniol aurait décuplé son chiffre d'affaires avec ces deux-là. D'ailleurs, même les chiens y passent; pôv' bêtes...

Il y a tout de même une vague morale implicite dans ce bouquin : la farce n'est pas pas uniquement dans les livres.
Et puis, faire bosser les vieux jusqu'à plus soif, ça devient très dangereux pour tout le monde, il n'y a pas que les flingues qui s'enrayent, les cerveaux aussi, surtout les cerveaux !!
C’est sinistrement hilarant, personne n'en sort intact (c'est le cas de le dire...) à quelque titre que ce soit.

A lire pendant les vacances, si le temps est pourri....
ça tombe comme à Gravelotte 9 étoiles

Pierre Lemaître a débuté sa carrière par quelques romans noirs bien torchés, il a même reçu un Prix CL pour l'un d'entre eux, ce n'est pas rien. Puis il est passé à des choses plus sérieuses, ce qui lui a valu un Prix Goncourt et il a décidé dès lors de construire une "œuvre" comme on dit. Adieu donc les petits romans noirs. Seulement voilà, les fans de la première heure ne cessaient de lui réclamer à cor et à cri un nouveau polar noir ! Alors, il s'est exécuté, mais au lieu de se remettre face à une page blanche, il a ouvert un tiroir dans lequel traînait un vieux roman jamais publié. Son premier roman, écrit dans les années 80. Ainsi donc, son dernier roman noir est en fait... le premier !
Mathilde a la soixantaine, un peu trop grosse, un peu trop maquillée, mais à part ça, c'est une mamie ordinaire, du moins à première vue. Car Mathilde cache un secret, elle est tueuse à gage ! Elle excelle dans son métier, c'est la meilleure, seulement voilà, elle vieillit et, comme le disaient De Gaulle et Chateaubriand, la vieillesse est un naufrage. Lors de son dernier contrat, elle a fait un peu n'importe quoi et l'organisation qui l'emploie se pose quelques questions et charge son superviseur, Henri, surnommé "le commandant", de la contacter pour tirer les choses au clair. Henri et elle se connaissent depuis le Maquis quarante ans plus tôt, il est secrètement amoureux d'elle depuis tout ce temps mais ne s'est jamais décidé à déclarer sa flamme. Il la couvre encore cette fois, mais Mathilde dérape de plus en plus....
Autant vous le dire tout de suite, dans cette histoire, ça tiraille de partout et ça tombe comme à Gravelotte. Faut pas contrarier la Mamie, elle a la gâchette facile ! Vu comme ça, on pourrait croire que cette histoire est glauque et sordide, mais l'humour est omniprésent, humour noir et grinçant bien sûr, ça ne plaît pas à tout le monde mais perso j'adore. J'ai donc dévoré ce livre avec délectation, même si ce roman de jeunesse de l'auteur est parfois un peu prévisible et redondant, il n'en demeure pas moins prenant et agréable à lire.

Patman - Paris - 61 ans - 3 janvier 2024


S’il n’en reste qu’un-e 6 étoiles

Mathilde Perrin, "soixante-trois ans, mère de famille, veuve d’un médecin, médaillée, héroïne de la résistance " et... tueuse à gage.
"En même temps, tout le monde a le droit de mourir, pourquoi pas elle, mais elle n’a jamais pu s’empêcher, en suivant une cible, en cherchant le moment, l’angle, l’endroit, etc., de se demander pour quelle raison elle fait l’objet d’un contrat."
Portrait étonnant de cette femme capable de torturer et de tuer sans état d’âme. Sous les ordres du commandant Henri, qu’elle connaît et dont elle est amoureuse depuis des dizaines d’années.
On croise aussi des personnages attachants comme Constance et son petit garçon, René Vassiliev, inspecteur souffre-douleur du commissaire Occipinti, proche d’un ancien préfet Monsieur de la Hosseray, à qui il rend régulièrement visite ainsi qu’à sa sympathique garde-malade Tevy.

La lecture de l’avant-propos donne un éclairage indispensable pour comprendre ce récit que j’ai trouvé loin des romans policiers passionnants et construits auxquels nous a habitués l’auteur.
Avec comme personnage central une héroïne originale, aussi professionnelle que confuse qui inspire peu de sympathie. Même si le rythme est soutenu et malgré l’admiration que je porte à M. Lemaitre, la succession de cadavres ne m’a pas conquise, malgré une fin marquante.
Avis mitigé donc sur cette lecture.

Marvic - Normandie - 65 ans - 15 mars 2023


Un , deux, trois qui a la balle 8 étoiles

Pierre Lemaître : « Le serpent majuscule »
C’est bien connu : il ne faut jamais se fier aux apparences. Ainsi notre Mathilde. En y regardant bien, vous constaterez qu’elle fut, jadis, une bien belle jeune fille, une très belle jeune fille même. A c’t’heure, elle a passé 60 berges, elle est rondouillarde et promène son gros cul. Mais vous constaterez également qu’elle a d’autres défauts : elle déteste son voisin qui est un gros con, elle n’aime pas trop sa fille- ni pas grand monde d’ailleurs, à part Henry un collègue des services secrets qui finira par lui cherchez des poux -, et surtout, avec un gros flingue, elle aurait tendance à tirer sur tout ce qui bouge. Par contre, elle aime les chiens mais, le hic, c’est qu’elle tombe toujours sur des toquards. Bref c’est une tueuse en série, comme on dit.
On ne s’ennuie pas souvent avec Pierre Lemaître. Jamais, même, semble-t-il. C’est son premier polar, écrit en 1985, qu’il a ressorti de derrière ses fagots, pour notre plus grand plaisir et, en sus, c’est marrant.
Extrait :
Bien des hommes ont un problème avec l’âge. Soit ils refusent les années et ils sont pathétiques, soit ils les revendiquent et ils sont ridicules.

Catinus - Liège - 72 ans - 15 janvier 2023


Décapant et amusant 9 étoiles

Depuis plusieurs années ses lecteurs lui ont demandé s'il allait ré-écrire des livres policiers.
Pierre Lemaître a décidé, enfin, pour le plaisir de tous, de publier un manuscrit qu'il avait écrit en 1985 mais qu'il n'avait jamais adressé à un éditeur.
Voici le livre.
L'action se situe à l'époque où il n'y avait pas de téléphone portable et où la police ne disposait que des cerveaux et un peu de matériel un peu désuet.
Désuet ? A voir nous avons notre jugement de maintenant.
Le livre se lit facilement et l'aspect dramatique disparaît grâce à un effet bande dessinée...
On y meurt beaucoup et « presque » joyeusement.
Si vous voyez une vieille dame d'un peu plus de 60 ans, grosse et insignifiante à première vue, il faut partir sur le champ et s'éloigner.
Elle s'appelle Mathilde et elle est impitoyable et bien organisée.
Elle tire plus vite que son ombre en visant la cible commandée et celles qui la dérangent sur son passage.
Elle est tueuse à gages depuis très longtemps.
Sa carrière a commencé sous la résistance où elle éliminait sans pitié les ennemis et les traîtres.
Personne n'est tranquille, même pas le tueur qui doit à la fois se méfier des témoins et à la fois du commanditaire qui peut, à un certain moment vous vouloir du mal.
« La tranquillité, dans ce métier, c'est un ticket pour le cimetière, mais il est aussi serein qu'on peut l'être quand on a tenté de parer à toutes les éventualités. »
Ce roman est noir, parce que c'est le genre dans lequel on le classe , mais moi, j'ai beaucoup souri car l'humour est parfois décapant et il vaut mieux tuer et se faire tuer dans une fiction plutôt que vivre trop dangereusement dans la vraie vie.
Embarquez pour cette croisière où les morts tombent comme des mouches, pour notre plaisir et oubliez vos soucis et vos affaires car ce livre se dévore d'une seule traite.

Jean-François Chalot

CHALOT - Vaux le Pénil - 76 ans - 18 décembre 2021