Les Bêtes
de Pierre Gascar

critiqué par Bookivore, le 23 juillet 2021
(MENUCOURT - 42 ans)


La note:  étoiles
Bêêêê, meuuuh, miaouuuu, ouaf ouaf et les autres
Prix Goncourt en 1953 pour ce recueil de nouvelles (c'est pas courant qu'un recueil de nouvelles obtienne ce prix) écrit par Pierre Gascar, dont c'est le seul livre que je connaisse.
"Les Bêtes", par la suite publié dans la collection "L'Imaginaire" de Gallimard (un des premiers parus dans cette collection qui, désormais, contient plus de 700 références), offre 6 textes allant de 20 à 50 pages, tous mettent en scène au moins un animal. Pas comme dans les fameux "Dialogues de bêtes" de Colette qui les font parler entre eux, non ; ici, les animaux sont des animaux lambda, ils ne parlent pas, c'est pas "Demain les chiens" ou "La Ferme des animaux".
Ce recueil parle de la différence entre les Humains et les animaux, mais surtout du fait que, par certains côtés, certains humains sont comme des animaux, et qu'en fait, l'Homme est un animal, juste plus développé que certains (à mater le comportement des singes, on se demande parfois si ce ne sont pas des comédiens en costumes poilus).

Pour tout dire, je ne sais que penser de ce recueil. La moitié au moins des textes m'a vraiment plu, comme "Gaston", dans lequel on cherche à annihiler une invasion de rats, et surtout à mettre la main sur un rat en particulier, surnommé Gaston, on ne sait pourquoi. Ou bien la nouvelle-titre, dans laquelle des prisonniers russes parqués dans l'enceinte d'un cirque sont assimilés, par l'auteur, à la ménagerie attenante que les employés nourrissent... Mais surtout "La vie écarlate". Dans cette nouvelle, un petit garçon, pendant ses vacances, va servir d'assistant à son oncle boucher qui tue ses bêtes lui-même. Le gamin assiste au massacre des agneaux, des veaux (comme par hasard, des "enfants"), le sang gicle, les tripes sortent, les corps sont démantibulés, dépecés, de quoi rendre herbivore un Président du jury de la Confrérie de la Tête de Veau ou du Mouton-Haricot. Je ne sais pas si l'auteur était végétarien, mais la nouvelle l'est.
Les trois autres nouvelles sont moins marquantes, même si "Les Chevaux", la première (des chevaux blessés, traumatisés par la guerre en cours, sont violentés par des soldats à peu près dans le même état physique et psychologique qu'eux), marque les esprits.
Ce recueil m'a parfois pas mal fait penser à du Borges français, parfois un peu abscons (la dernière nouvelle, "Entre chiens et loups", il est difficile de rentrer dedans), une ambiance parfois irréelle, proche du fantastique. Un des plus étonnants Goncourts. J'aimerais bien savoir les motivations du jury, à l'époque, pour cette obtention.