La Table des enfants
de Isabelle Hausser

critiqué par Jeparo, le 26 août 2004
(Bruxelles - 59 ans)


La note:  étoiles
une femme en mutation
Après trois romans russes, Isabelle Hausser tente et réussit une reconversion dans un genre différent. Elle flirte ici avec les codes du genre polar tout en faisant autre chose. Son personnage, Agnès, est romancière et est l'auteur de deux séries de polar, l'une ayant pour décor les vignes bordelaises, l'autre ayant pour protagoniste rien moins qu'Emmanuel Kant (on profite au passage d'ailleurs d'un savoureux chapitre entier de ce roman dans le roman).
Sa fille aînée Elizabeth vient de mourir avec son mari dans un accident de voiture, elle quitte dare-dare Bruxelles et sa seconde famille (deux autres enfants plus jeunes et un mari infidèle) pour s'occuper de ses deux petits-enfants résidant en Allemagne. Connaissant peu de choses sur eux, dans la mesure où elle n'a quasi plus revu sa fille depuis une décennie, Agnès tente de surmonter ce deuil écrasant tout en assumant la prise en charge des orphelins.
Peu à peu quelques éléments (dont le testament d'Elizabeth) l'intrigueront et lui feront penser que sa fille avait prévu sa mort. Agnès enquête et découvre lentement, de rencontre en rencontre, une vérité qui sort des sentiers battus.
Hausser tisse très finement son intrigue; les personnages qu'elle brosse sont denses, riches et vibrent d'une vérité humaine captivante.
Le séjour d'Agnès en Allemagne se rallongeant chaque fois, on assiste à une progressive et crédible métamorphose du personnage, métamorphose engendrée à la fois par ses découvertes (non, je n'en dévoilerai aucune) et par sa propre remise en question constante.
Voilà un portrait fin et intelligent d'une femme en pleine mutation induite entre autres par le questionnement de celle-ci sur les rapports mère-fille. Hausser s'autorise le temps d'un chapitre à renouer avec le sujet psychanalytique qu'elle maîtrise avec une grande perspicacité (comme on a pu le constater dans Les magiciens de l'âme) en imaginant un entretien éclairant entre Agnès et le psy de sa fille.
C'est toujours un régal de lire un auteur capable de fouiller loin et juste au fond de l'âme de ses personnages. Hausser excelle dans cet art. A découvrir donc.
Grosse déception! 3 étoiles

On m'avait parlé de ce livre comme le livre à lire pendant les vacances. Quelle déception! Pour l'intrigue passe encore mais alors le style rédactionnel absolument lamentable. Je me suis accrochée pour arriver au bout.
La relation mère fille, élément central du livre relève plutôt d'une thérapie à faire à deux que de la réalité.

Isj - - 71 ans - 22 août 2011


une érudition un peu ostentatoire 5 étoiles

Assurément, Isablelle Hausser maîtrise son sujet. Elle utilise effectivement les codes d'un suspense policier pour reconstruire pas à pas l'existence d'une jeune femme dont la mère découvre la vraie personnalité. Pourtant, on reste sur sa faim, et cela me semble être dû à un manque de rythme. Le roman aurait pu être amputé d'une bonne centaine de pages, en le dégraissant de certaines explications un peu appuyées sur les réactions des personnages. Par ailleurs, à moins d'être un mélomane spécialiste de Bach, on finit par s'irriter de certaines digressions et métaphores musicales. Elles finissent par apparaître comme l'alibi culturel qui doit hausser ce roman au rang d'oeuvre littéraire. C'est une tendance (me semble-t-il) assez courante dans le monde du policier.
Par ailleurs, en ce qui concerne le suspense entretenu sur les circonstances de la mort d'Elisabeth, la montagne accouche d'une souris, et l'on a peine à croire aux motivations évoquées.
Ceci dit, cela reste un bon roman, dont les personnages prennent corps, avec un thème original : c'est déjà beaucoup !

Blinis - - 64 ans - 30 août 2005


quel style ampoulé.. 3 étoiles

L'histoire me plaisait, l'intrigue, telle une enquête, était bonne.. Les personnages bien construits psychologiquement (bien que je ne puisse pas comprendre comment une mère peut "accepter" de ne pas voir sa fille pendant des années, parce que telle est la volonté de cette dernière), et attachants. Mais alors le style, à certains moments, m'a littéralement sciée!! tellement nul, tellement littérature de gare, que c'en était lamentable. Dommage, cela s'annonçait très bien.

Daffodil - - 53 ans - 11 août 2005


Un certain style... 10 étoiles

Je ne reviens pas sur l'intrigue, celle-ci ayant déjà été développée précédemment, et d'ailleurs ce n'est pas vraiment ça qui m'a accrochée dans ce roman.
Le vrai "plus" selon moi, c'est le ton général, puissamment dramatique, mais par effleurements, petites touches éparpillées dans l'histoire, et hors contexte. Des petits bouts de romans écrits par Elisabeth, par Agnès, des personnages esquissés, comme le pasteur, le psychiatre, une certaine Allemagne en filigrane, et la musique, bien sûr.
Ici l'écriture d'Isabelle Hausser fait mouche, elle est poétique mais ne part jamais dans un lyrisme effréné, elle est vraie et profonde.
Etrangement aussi ce ne sont pas tant les relations mère-fille dont il est abondamment question qui m'ont émue, (ni le personnage principal qui m'a énervée plus d'une fois, lassée de ses atermoiements et de ses manques à sa famille, car quand même ses propres enfants, son mari, il en est peu question), mais plutôt ces petits-enfants qu'on arrive vraiment à aimer, le petit Fabian, la petite Cornelia, on sent à travers leurs descriptions tout l'appétit d'amour de ces petits bouts de choux, on a envie de les serrer fort, l'émotion assez physique du rapport au nouveau-né est ici très bien rendue, je trouve.
Un bloc de pages qui emmènent ailleurs, qui donnent à réfléchir sur la famille, sur ces gens qu'on côtoie tellement et qu'au final, on connaît si imparfaitement...

Un coup de coeur !

Cuné - - 57 ans - 27 janvier 2005