Oh, et puis zut !
de Iocasta Huppen

critiqué par Débézed, le 20 décembre 2020
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Une année en senryus
Comme le souligne l’éditeur dans la quatrième de couverture, ces poèmes brefs ressemblent étrangement à des haïkus, ils en ont la forme mais pas le contenu. Les Japonais les nomment « senryu », ils ont pour sujet principal les faiblesses humaines avec ou sans une référence à la saison. Iocasta Huppen, grande spécialiste des poèmes courts d’inspiration japonaise, propose avec ce recueil une sorte d’éphéméride qui raconte une année calendaire qui commencerait au printemps. Une année qui pourrait être celle qui s’écoule avec des compléments de précédentes pour raconter l’automne qui vient de finir et l’hiver qui commence. Comme les haïkus, ces poèmes sont composés de trois vers, deux parfois, qui ne comportent que quelques mots, rarement plus de cinq. Avec ces quelques mots, elle raconte la vie qu’elle mène à Bruxelles ou sur les lieux de vacances qu’elle a fréquentés.

Ainsi, dès le début, elle évoque la vie de cette année difficile avec son confinement qui nous a tellement entravé et a fait tout autant jaser :
« Dans le ciel bleu / Le scoop de quelques traces d’avion - / confinement mondial »

A cette saison, au Japon les cerisiers fleurissent, Iocasta ne l’a pas oublié :
« Reflet - / des pétales de cerisier / partout sur la lune »

Une nouvelle importante fleurit ce début de ce printemps :
« Cinquième mois - / la graine apportée par le vent / se porte bien » ???

Pour fêter l’arrivée de l’été un peu de musique avec trois titres de chanson alignés en forme de senryu :
« Passe me voir / Je t’aime tellement fort / Juste nous »

Et, l’été, c’est les vacances :
« Départ imminent / crème solaire, maillot de bain / et masque en tissu »

Et, les vacances, c’est la liberté :
« L’une des fesses / dépourvue de sa part de maillot - / se croire seule au mode »

Et le plaisir coquin … :
« Câlin à l’étang / une grenouille / nous tient la chandelle »

L’été s’en va, les vacances se terminent, l’automne approche :
« Fin des vacances / la fuite irréparable / du fauteuil gonflable »

L’automne s’installe !
« Rayon après rayon / l’araignée tourne en rond - / lumière d’automne »

Puis, cède la place à l’hiver :
« Soleil de décembre - / de la fiente de pigeon / un peu de vapeur »
« Grêle de février - / quelques grains de cardamone / dans mon café grec »

Le cycle est terminé, nous avons tous un an de plus et nous savons comment Iocasta a passé cette année, elle nous l’a confié en quelques mots comme des images qu’on range précieusement pour, plus tard, se remémorer de bons souvenirs. Malgré toutes ces images iréniques et apaisantes, Iocasta sait bien que le monde ne tourne pas très rond :
« Le monde va mal / le zapper quelques minutes / au bord de l’eau »
Peut-être qu’il tournera plus rond l’an prochain … ?