1923, en Angleterre dans une petite ville qui n’est pas Londres (ça ira plus vite en le disant ainsi). Triss, jeune fille aînée (11 ans) du couple Crescent, vit confortablement et surprotégée avec Pen, sa jeune sœur de 8 ans, à Ellchester. Où son père, Piers Crescent a la situation aisée d’architecte reconnu de la ville, qui a créé de nombreux ouvrages d’art qui sortent de l’ordinaire.
Mais Triss émerge tout juste d’une quasi noyade lorsque le roman commence. Elle a bien failli y passer et finit par revenir à la conscience … pour s’apercevoir qu’elle ne se sent pas comme d’habitude, qu’elle ne sait plus qui sont les gens qui l’entourent, ou si peu, et qu’elle est agressée verbalement par Pen, sa jeune sœur.
»Theresa. Je suis Theresa. C’était vrai, elle le savait, mais ce n’était qu’un mot pour elle. Elle en ignorait le sens, lui semblait-il. Je suis Triss. Voilà qui était un peu plus naturel, comme un livre qui tombe ouvert sur une page maintes fois lue
…/…
- Bien. Où sommes-nous en ce moment ?
- Dans la vieille maison en pierre, à Lower Bentling, répondit une Triss de plus en plus assurée. Avec la mare au martin-pêcheur. » Elle reconnaissait l’odeur du lieu : les murs humides, et aussi les relents de plus en plus faibles de trois générations de vieux chats malades. « On est ici en vacances. On … on y vient tous les ans.
- Tu as quel âge ?
- Onze ans.
…/…
« Oh, regarde, Penny est venue te voir. Pauvre Pen … Je crois qu’elle n’a rien mangé depuis que tu es tombée malade, elle se tracassait pour toi. Entre donc, Pen, viens t’asseoir à côté de ta sœur …
- Non ! s’écria Penny si brusquement que tout le monde sursauta. Elle fait semblant ! Vous voyez pas ? Tout est faux ! Personne remarque la différence ? » Elle fixait le visage de Triss d’un regard qui aurait brisé la pierre en éclats. »
De fait, Triss, revenue à la vie, sent bien que quelque chose lui échappe. Et le lecteur aussi. Et tout va devenir de plus en plus bizarre jusqu’à ce que le roman entre in fine carrément dans un univers dickensien mâtiné de Lewis Carroll, assaisonné de Tim Burton – c’est vrai. Une vraie belle originalité en tous cas.
Les personnages principaux, outre les deux sœurs, intègrent aussi une iconoclaste Violet Parish, sorte de féministe avant-gardiste et sans complexe, ex-fiancée du frère aîné des deux sœurs qui est mort peu avant sur le champ de bataille pendant la guerre 14-18.
Le chant du coucou ne se limite pas à une histoire fantastique et parfaitement du domaine des contes. Il aborde aussi des sujets sociétaux de la période post première guerre mondiale sans avoir l’air d’y toucher mais nous ramène aussi vite à du limite Lewis Carroll. Je n’ai pas trouvé sur le moment ce roman facile à lire mais je m’aperçois avec le recul qu’il laisse une empreinte significative dans la mémoire. Se replonger dedans pour en écrire cette critique, c’est un peu comme retrouver un ami qui venait de s’éloigner …
Tistou - - 68 ans - 27 septembre 2021 |