Mes amours souterraines
de Olivier Sourisse

critiqué par C-MDS, le 7 juillet 2020
( - 35 ans)


La note:  étoiles
Un très beau roman de fidélité et de mise en péril.
« Fortune, gloire, puissance ? Je veux un trésor qui les contient toutes. Je veux…la jeunesse ».
Le Diable est satisfait de la réponse de Faust. Il savait.

Revenir. Se souvenir. Sombrer dans les eaux troubles de la mémoire : l’écrivain se penche au bord du livre. C’est sa vie, tout est charrié. 1982. Deux jeunes garçons de Nantes s’aiment. La cité l’ignore. Aux fenêtres éclairées du H.LM., des familles solides d’ouvriers vivent normalement. Eux se réfugient dans les caves, sous la vie des autres, dans l’obscurité de leur cachette. C’est le temps des grandes vacances et les enfants doivent se quitter. Partir à Paris, oui, à la rentrée, s’enfuir et vivre, enfin, de quoi ? on verra mais vivre enfin. L’un part « faire du bateau », un peu plus au sud, l’autre accompagne sa famille pour une expédition dans les Alpes, à bord de la nouvelle voiture du père. Deux mois d’arrachement, de dissimulation, de dépendance, d’impatience, de désespoir, de solitude au milieu des siens. Mais parce que c’est l’âge des découvertes et de l’initiation, deux mois où tant d’expériences nouvelles vont heurter les prévisions, réveiller les corps, bousculer les plans et souffler les châteaux de cartes. Et si l’on ne se retrouvait pas semblables au moment des retrouvailles ? Se pourrait-il ? Seule, la mort pourrait nous séparer !… Seule la mort ?

Fidèle à celui qu’il était, sans répudier l’innocence, la naïveté même des très jeunes gens, Olivier Sourisse signe là un de ses ouvrages les plus aboutis, n’ajoutant pas un roman « tendrement gai » à une liste vertigineuse : c’est, en effet, une œuvre originale, authentique, arrachée au temps comme une amphore sortie ruisselante de la mer. Cette vérité de ton bouleverse, atteint, révèle ce que, chacun, au fond de soi, croyait disparu. Un très beau roman de fidélité et de mise en péril.