I am, I am, I am
de Maggie O'Farrell

critiqué par Marvic, le 16 octobre 2020
(Normandie - 65 ans)


La note:  étoiles
Autobiographie anatomique
C’est par ces mots de Sylvia Plath que l’on entame le livre : "J’ai respiré profondément et j’ai écouté le vieux battement de mon cœur. Je suis, je suis, je suis". Maggie O’Farrel le terminera avec : "Elle est, elle est, elle est."

Entre ces deux citations, on découvrira les épreuves passées et présentes que traverse l’auteure.
Une succession de chapitres dont les titres sans ordre apparent, ni chronologique, ni physique, puisque le titre de chaque chapitre est la partie du corps souffrante.
Au fil des lectures, on voit cependant s’intensifier les drames.
Cela peut être des risques encourus comme une noyade, le croisement d’un meurtrier pendant une balade solitaire, un accident évité de justesse puis plus personnels, plus douloureux, comme les accouchements sous césarienne qui se passent mal, les fausses couches à répétition ; Maggie frôle la mort de plus en plus près.
"Ce n’est pas ce sentiment de mortalité , mais quelque chose d’autre qui se solidifie, qui prend racine en moi quand ce paysage se conjugue à la sensation d’avoir échappé de très près à une chose que je n’aurais pas pu contrôler. Ce sentiment d’avoir, une fois encore, retiré la corde passée autour de mon cou... "

Et puis le chapitre sur son encéphalite. On est atterré par la maladie mortelle qui touche cette vaillante petite fille de 8 ans. Cette enfant dont les séquelles marqueront toute sa vie, continueront à l’handicaper et qui pourtant ne lui enlèveront jamais ce besoin de bouger, de voyager ;
"Le jour où l’on m’avait lu Alice au pays des merveilles, au moment où Alice s’exclame, "oh, comme j’aimerais pouvoir fuir les jours normaux ! Je voudrais me laisser emporter par mon imagination", je me souviens de m’être dressée dans mon lit et d’avoir pensé, Oui, oui, c’est exactement ça. ..il me suffisait de voyager. "

Le dernier chapitre sur l’anaphylaxie de sa fille est d’une telle tension, d’une telle douleur qu’aucune maman ne pourra rester indifférente au calvaire que vit cette enfant.

Je suis aussi séduite par cette autobiographie que je l’avais été par les deux romans précédents . Par cette écriture et ce rythme percutants, cette manière originale d’intituler les chapitres.
Impressionnée aussi par le courage de l’auteure, sa volonté ; une lecture forte et bouleversante.

Et on comprend la réflexion du petit ami "qui l’a regardée d’un air médusé, comme tout le monde le fait la plupart du temps" et qui lui dit : "C’est fou d’avoir aussi peu de chance."
"Je me souviens avoir été surprise, car je vois précisément les choses dans l’autre sens. Les gens pensaient que j’allais mourir ; je ne suis pas morte."
Une femme incroyable, un livre marquant.