Ce livre m’a littéralement passionné. Cette jeune journaliste Franco-Allemande a voulu savoir ce que ses grands-parents avaient fait, avant, pendant et après la guerre, et son jugement est implacable. Pourtant elle nous remet dans l’ambiance de l’époque : pour les Allemands, au moment même, c’était tellement facile de suivre le mouvement et de se donner bonne conscience ! Mais l’auteur(e) a aussi enquêté du côté de sa famille française et hélas ! du côté français, le résultat n’est pas plus brillant.
De fil en aiguille, ses recherches l’ont menée à refaire tout l’historique du XXème, notre siècle, le siècle où nous avons vécu. Et ce côté du livre est encore plus passionnant. Elle nous remémore les grands événements de la guerre ; puis elle examine comment, après coup, on a raconté ces événements : objectivement dans certains pays, et en les déformant dans d’autres. Dans certains cas la manipulation a été telle que les bourreaux sont devenus les victimes.
Ce qui est impressionnant, c’est qu’elle nous raconte l’histoire vécue au niveau des populations ; on a l’impression qu’elle nous raconte notre histoire.
Elle nous parle de livres tellement révélateurs qu’ils ont été interdits dans certains pays ; et elle énumère les films et les séries télévisées qui ont raconté la guerre telle qu’elle était. Et on se souvient de l’effet incroyable que ces reportages faisaient dans le public. Notamment cette série « Holocauste » dont tout le monde parlait avec des larmes dans les yeux. Ces documents nous ont révélé, avec un réalisme inouï, ce qui avait été trop longtemps passé sous silence. Et beaucoup parmi nous avaient honte parce que, si on savait, on se taisait, on voulait oublier.
Alors l’auteur(e) défend une cause et elle le fait avec un brio exceptionnel, et preuves à l’appui : là où le devoir de mémoire s’est accompli, dit-elle, là où les populations ont vu leur passé sans concession, là où les populations ont pu demander pardon pour les crimes commis, les horreurs du populisme, du fascisme et du racisme ne renaissent pas. Ailleurs, il faut s’attendre au pire !
Elle passe en revue tous les pays d’Europe en examinant comment on y a raconté la guerre, et comment, bien souvent on a faussé l’histoire. Ça a été le cas sous les régimes communistes, notamment en ex-RDA mais pas seulement. Dans d’autres pays d’Europe, où le devoir de mémoire a été faussé, renaissent aujourd’hui le populisme, le fascisme et le racisme avec une virulence inquiétante.
Personnellement, j’ai été épaté par le contenu historique du livre et j’ai été convaincu par son plaidoyer. J’ai même été retourné par ce livre. J’avais toujours pensé qu’il était bon de s’imposer une longue période de silence, le temps que passe la génération de la guerre, pour arriver à une réconciliation. J’avais tout faux. La lecture de ce livre m’a convaincu qu’un devoir de mémoire objectif et sans concession était indispensable si l’on veut bannir à jamais les fautes du passé.
Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 89 ans - 20 novembre 2020 |