Une Pellicule Sur la Tête d'un Pauvre Type
de Patrick Henin-Miris

critiqué par Débézed, le 24 juin 2019
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Quand les mots de lèveront
Dans son propos introductifs, l’éditeur avoue qu’il ne sait pas grand-chose de cet auteur de « bonne rumeur » faute d’être de « bonne réputation » et il nous nous donne un conseil que, pour une fois, j’ai suivi : « Alors puisqu’on ne sait rien en dire, autant le lire… ». Je l’ai donc lu et j’ai été convaincu, Patrick Henin est un auteur plein d’esprit et de finesse qui observe notre monde avec attention sans faire aucune concession. Certain chroniqueur a dit que ce recueil était bien équilibré, qu’il abordait tous les sujets importants, j’en convient tout à fait, mais, pour ma part, j’ai retenu quelques thèmes que j’ai trouvés très présents parmi les aphorismes présentés.

La bêtise humaine est évidemment le premier thème que l’auteur évoque, comme moi, il s’étonne que nous résumions toute la vie à des chiffres, des pourcentages, des ratios, des équations et qu’on oublie que le monde est aussi fait d’émotions, de sensations, d’impressions, de sentiments, d’idées, de pensées, …

« Plus on chiffrera le monde, plus les hommes iront chercher leurs mots ailleurs. »

Et comme tous les pouvoirs ne dirigent qu’en s’appuyant sur des chiffres, ils font tous faillite en entrainant le monde dans la grande muraille de vide qui nous entoure.

« Cette société est un assemblage aussi fragile que la porcelaine et je ne m’étonne pas qu’on élimine d’abord les éléphants. »

Dans ce recueil, l’éléphant est très présent, c’est le symbole de la destruction de la planète, la métaphore de l’incapacité des hommes à assurer leur bien être sans hypothéquer leur avenir. Les marchands ont aveuglé les dirigeants comme les consommateurs en les gavant d’illusions.

« Et on voudrait nous faire croire que si nous avons des pieds, c’est pour acheter des chaussures. »

Il restera toujours l’amour même si l’amour est un chemin souvent jonché d’embûches

« Elle m’avait donné l’épreuve de son amour. » Mais, « Avant qu’elle s’en aille, j’ai creusé un trou dans sa mémoire et je m’y suis caché. »

Alors pour dernier refuge, il nous restera les mots en espérant qu’ils ne seront pas altérés, dévoyés, estropiés.

« Business is business, mais pourquoi toujours parler en anglais ? Les saloperies sont des saloperies, c’est tout ! »

Alors rêvons, espérons que les mots seront plus efficaces que les bombes

« Quand est-ce que les mots couchés sur le papier se lèveront et marcheront dans la rue. »

Notre combat n’est pas seulement sur terre et dans les airs, il est surtout dans les mers, les mers qui lancent ce cri que nous n’entendons pas :
« Il y a tellement de bouteilles à la mer aujourd’hui, que c’est elle qui appelle au secours. »