Les amoureux du Jour 2
de Pierre Cayouette

critiqué par Libris québécis, le 31 janvier 2019
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Référendum sur l'indépendance du Québec
Ceux qui étaient de jeunes adultes en 1980 savoureront ce roman. Il leur rappellera l’idéal qui les animait à l’époque, soit celui de vivre dans un Québec libre, comme l’avait proclamé Charles de Gaulle du haut du balcon de l’hôtel de ville de Montréal en 1967. Il avait soulevé un enthousiasme qui a dégénéré en crises d’amertume.

Christian, le héros du livre, un jeune homme de 18 ans, a vécu le pic de l’espoir déclenché par le général venu visiter L’Exposition universelle de 1967, soit celui du référendum de 1980 que l’on espérait positif en faveur de l’indépendance. Mais les ténors du non ont sorti tous les lapins de leur chapeau afin que rien ne bouge au Québec, comme l’avait déjà souhaité Louis Hémon dans Maria Chapdeleine. Aux lendemains de leur défaite, tous les défenseurs de la souveraineté se sont sentis trahis. Comment s’en sortiront-ils ? L’auteur soulève la question, mais n’y répondra pas.

Pierre Cayouette entraîne plutôt ses lecteurs sur une piste qui mène au-delà de toutes les embûches psychologiques et sociales. Le titre annonce déjà son intention : être amoureux. Amoureux de la vie tout court malgré les drames qui l’accompagnent. Christian tisse des liens avec tous et chacun. Il aime être en compagnie d’autrui. À l’école, il se lie d’amitié avec un copain qu’il aime retrouver à la bibliothèque le jour 2 de son horaire scolaire. Ses amours s’arrêtent aussi à une amie d’enfance avec qui il s’est retrouvé en colonie de vacances. Ce fut l’occasion des premières caresses. Toutes ses relations sont inextinguibles. Avec ses parents de prime abord. Sa mère meurt d’un cancer en tenant la main de son fils qui s’est endormi à son chevet. Dans une résidence pour personnes âgées, il trouve son mentor dans un vieil homme à qui il est jumelé dans le cadre d’une activité de rencontres intergénérationnelles. Tout contribue à faire de lui un homme meilleur et plus accompli malgré les obstacles comme son amputation d’une jambe à la suite d’un cancer qui a rongé son fémur. Être heureux, c’est sa devise en dépit des ruptures de la vie qui l’arrachent abruptement à ce qu’il tient. Contrairement à Sartre, il dirait le ciel, ce sont les autres.

L’auteur évite le lyrisme des romans du bonheur frelaté. Il indique tout simplement où on le débusque. Et le cheminement de son protagoniste suit toutes les péripéties sociales qui ont marqué le Québec à partir de l’avènement du parti séparatiste porté au pouvoir sous la férule charismatique de René Lévesque. Le lecteur renouera avec la décennie du référendum de 1980 et, en particulier, à partir de l’arrondissement de Pointe-aux-Trembles.

L’aspect social se double d’un volet culturel qui révèle les sources qui alimentent le jeune héros. Et comme Térence, rien de ce qu est humain ne lui est étranger. La littérature et la musique composent le menu de son quotidien. L’auteur brosse le tableau de son protagoniste avec une plume cursive, délicate, voire émouvante. Certains pourraient lui reprocher ses trop nombreux rebondissements dramatiques, mais il reste qu’Il a concocté une œuvre jouissive et facilement adaptable au grand écran.