Les belles-soeurs
de Michel Tremblay

critiqué par Cuné, le 12 juin 2004
( - 57 ans)


La note:  étoiles
LA nature humaine...
Germaine Lauzon a gagné 1 million de timbres et des livrets pour les y coller. Avec, elle projette l'acquisition d'un tas de mobilier dans le catalogue joint. Elle est très contente, Germaine. Elle compte faire d'une pierre 2 coups en conviant ses voisines, soeurs, belles-soeurs etc.. à venir l'aider à coller les timbres dans sa cuisine, tout en parlant de tout et de rien autour d'une liqueur. Mais voilà toute la nature humaine qui se révèle au cours de cette soirée !....

truculent !! Non mais sérieusement, je me serais crue dans le milieu de mon enfance. Imaginez un clan de polonais implantés dans le Pas-de-Calais, même époque, fin des années 60. les hommes sont à la mine, les femmes se reçoivent les unes les autres sous divers prétextes et c'est la même chose ! Remplacez le joual par le patois du Nord... Impayable ! Cruel ! Abject ! Adorable ! pitoyable ! ben tout y est.
En plus cette édition comprend des photos des actrices ayant interprété les rôles, une intro d'Alain Pontaut (que j'ai trouvée très pompeuse !) et à la fin diverses critiques parues ça et là dans la presse....
Un régal je vous dis.
Même et surtout si ce qui vous en reste en le refermant c'est un rictus désabusé....
Les Licheuses de timbres 9 étoiles

Cette pièce de Michel Tremblay me rappelle ma mère, qui avait gagné, comme l’héroïne Germaine Lauzon, autant de timbres primes en participant à un concours organisé par une chaîne de télévision. Intéressant de revivre cet heureux événement par personnes interposées !

Le dramaturge a osé réécrire le mythe de Sisyphe au féminin. En 1968, on lui a reproché son audace, le taxant même de mauviette comme Jean Bédard, professeur, romancier et essayiste. « Même pas capables de se faire reluire la plume sans la permission de pôpa, môman, matante, mononcle, les voisins, toute la rue Fabre, hosanna au plus haut des cordes à linge ! Rien que des hosties de lécheux de timbres. » (Première Jeunesse, Éd. Leméac, 1998, p. 288) Pourtant, il s’avérait nécessaire de redorer le blason de la femme. Depuis que Saint Thomas d’Aquin eut affirmé, à ses risques et périls, qu’elle fût dotée d’une âme comme ses pairs masculins, rien n’est venu glorifier « le deuxième sexe ». Il a fallu attendre Simone de Beauvoir et Michel Tremblay, récusé à l’époque pour avoir méprisé les femmes en les caricaturant.

Le message se véhicule beaucoup mieux aujourd’hui. La femme n’est plus casée dans le rayon ménager, mais l’Église, défenderesse des droits de l’homme, lui refuse encore le sacerdoce. « Quelle vie plate ! », lui fait chanter le librettiste. Vie réduite à la messe d’un quotidien qui lui interdit au Québec jusqu’en 1960 de détenir un compte bancaire, d’enseigner si elle est mariée et d’autoriser une intervention chirurgicale pour sauver son enfant même si sa vie en dépend. La pièce a perdu de son acuité chez nous, mais sa représentation se justifie encore pour s’attaquer, comme dans Le Cheval de Troie, au dernier rempart de la résistance de l’homme au partage de son pouvoir, endossé par les religions.

Le succès de cette œuvre a poussé René-Richard Cyr à la transposer en comédie musicale avec la complicité du compositeur Daniel Bélanger. Le spectacle est captivant. La mise en scène présente, par des jeux de lumières ingénieux, des tableaux figés comme celui de la dernière cène qui orne les autels. Germaine Lauzon s’y retrouve entourée de ses apôtresses, prêtes à la renier et à la trahir sous l’effet de la jalousie. C’est un vrai délice de voir s’entredévorer ces « licheuses » de timbres (les humecter avec sa langue) venues prêter langue forte pour les coller dans des livrets. Le metteur en scène a réussi cet exploit en créant une synergie entre les comédiens, dont les interrelations ne sont pas destinées directement au public. Ça crée un mouvement langagier et physique, qui rapproche le théâtre du cinéma.

Libris québécis - Montréal - 82 ans - 12 mars 2012


Un pur délice, même dans un siècle! 9 étoiles

Les Belles-Soeurs m'ont, à plusieurs fois, fait éclater de rire, avec leur joual si réputé et fulgurant. Michel Tremblay est un des mes écrivains préférés et son anti-conformisme aux valeurs traditionnelles québécoises fait de lui un conteur très moderne et encore très lu même par des jeunes comme moi. D'autant plus que c'est un homme qui met en scène une quinzaine de femmes avec chacune leur vie quotidienne, leurs récits à la fois si comiques et si désolantes, leurs espoirs, leurs peines...
Rose Ouimet et Pierrette Guérin sont mes deux idoles dans cette pièce. L'une, malgré sa vie avec son "cochon de mari" et ses innombrables enfants, reste une femme avec un fort caractère et un incroyable humour. On peut même dire que c'est elle, la leader de la sororité en terme de conversation. L'autre est la brebis noire du groupe : débauchée, cinglante, femme cool pour les trois adolescentes de la pièce, indésirable pour le reste... Elle qui représente la rebelle aux dogmes de la société québécoise des années 50.
Cette pièce est peut-être d'une autre époque pour le Québec, mais pour les pays du Tiers-Monde, c'est très d'actualité. Je pense que c'est pour ça qu'elle est jouée encore partout sur la planète, dans presque toutes les langues importantes. Ça m'a rappelé des souvenirs également car je suis d'origine syrienne et la mentalité des Belles-Soeurs est omniprésente dans ce pays.
Bref, je ne m'en lasserai jamais de le relire à nouveau, encore et encore!

Montréalaise - - 31 ans - 7 août 2010


Un de nos classiques québécois 7 étoiles

Cette pièce célèbre ses 40 ans et la lecture d’un extrait par Isabelle Maréchal à TLMEP (qui joue Pierrette, la guidoune de la famille) m’a donné le goût de la lire. Je me reconnais dans le parler (not’ perler d’cheu nous), même si je trouve que c’est trop exagérément joual. Je crois que l’histoire dépeint bien la réalité des femmes de l'époque (les années soixante) et même un peu des femmes de nos jours (la religion en moins, à cause de la Révolution tranquille). Je ne comprends pas la fin avec les timbres qui tombe du plafond et le Ô Canada... C'est sensé être une métaphore, mais je ne l’ai pas comprise. Entéka, chus don ben contente que cet’ pièce soye bonne, j’l’aime fort!

Nance - - - ans - 18 décembre 2008