L'ours : L'autre de l'homme
de Rémy Marion

critiqué par Radetsky, le 21 novembre 2018
( - 81 ans)


La note: étoiles
L'animal philosophe
On sait quelle réputation est faite aux misanthropes, aux amants de la solitude, aux anachorètes, à ceux qui méprisent les "bienfaits" de la civilisation : "quel ours !!"
La "bête", qui dessina dans notre lointain passé de plantigrade nu nombre de symboles, tantôt dépréciatifs tantôt louangeux, et qui fut assimilé parfois à un homme des bois, à un revenant, à un esprit, bref à quelqu'un avec qui il fallait compter, séduit à la fois par ses attitudes, ses aptitudes, et la puissance d'évocation d'une liberté à laquelle nous avons renoncé la plupart du temps pour des chimères, que nous payons de plus en plus cher, dans tous les sens du terme.

Ce bouquin n'est pas une digression de doux rêveur assis à sa table de travail. Rémy Marion a passé plus de temps sur le terrain que devant une page blanche.
A la fois éthologie de l'ours, biologie, description des territoires qu'il occupe, étude des interactions matérielles et culturelles avec les êtres humains, cet ouvrage place ce dernier face à ses responsabilités vis à vis d'un animal finissant, au fil de la lecture, par prendre notre place dans la hiérarchie des êtres vivants... ! Ce qui, au vu de "l'état des lieux" de notre espèce, n'est guère difficile.
L'ours est épicurien au sens premier, la parfaite image d'une sagesse et d'un courage dignes d'être médités, tandis que nous restreignons sans cesse son territoire par quantité de méfaits.

La valeur d'une chose ou d'un concept se mesure tout autant à sa force symbolique qu'à son apparence ou à sa substance.
L'ours est le symbole d'une ascèse, d'une certaine austérité, d'une indépendance, d'une liberté (bis repetita) dont les imbéciles qui le traquent avec des fusils sont peut-être jaloux ou à tout le moins ignorants.