Roissy
de Tiffany Tavernier

critiqué par Papyrus, le 20 octobre 2018
(Montperreux - 64 ans)


La note:  étoiles
Comme un scénario
Surtout, ne pas cesser de bouger, ne pas rester assise, changer de terminal, de vêtements, de coiffure, de valise même, se rendre invisible par le mouvement permanent, ne pas être repérée par les nombreux agents de sécurité et les non moins nombreuses caméras de surveillance. C’est ainsi que l’aéroport de Roissy, immense plateforme de transit, peut devenir un lieu où survivre, quand on n’a plus d’endroit où aller, quand on ne sait plus qui on est.
Anna, la narratrice, qu’on découvre quelque part dans l’immensité d’un couloir, partiellement amnésique, tente d’y survivre, fourmi parmi les centaines de milliers de fourmis qui y travaillent, ou y transitent.
En huit mois d’errance, Anna en a appris tous les recoins, chaque terminal, chaque bloc-sanitaire, les locaux techniques, les sous-sols et les combles. Elle en connaît les dangers et les codes, les cafétérias, les restaurants et leurs poubelles et les chambres d'hôtel louées à l'heure. Sa survie en dépend. Elle y rêve sa vie de voyageuse en partance, changeant de destination selon les humeurs, tentant d'intercepter les impressions de ceux qui rentrent, manipulant le mensonge avec dextérité, admirant les décollages de ces avions qui la fascinent. Elle donne le change.
Jusqu'à la rencontre. Celle d’un autre échoué des tarmacs, Luc, qui peu à peu, va l'amener à dévoiler une partie de son étrange vie faite de mensonges et de secrets...

J’ai été cueillie par ce texte qui m’a surprise et intriguée dès les premiers chapitres, et j’ai accompagné avec un grand intérêt cette "Anna" dans son incessante errance, anxiogène et palpitante, curieuse de savoir où tout cela allait nous emmener.
Le dernier quart du livre est à mon goût malheureusement moins réussi, avec des chapitres un peu laborieux, (superflus?) débouchant sur un dénouement que personnellement j’ai trouvé un peu décevant, me laissant frustrée avec trop de questions sans réponses et une sensation d’inachevé. C'est la raison pour laquelle il manque pour moi une étoile dans le firmament de "Roissy."

Tiffany Tavernier, également scénariste, (c'est la fille de Bertrand) nous livre malgré tout en cette rentrée littéraire 2018, un beau roman, original, vif, onirique parfois, et très émotionnel qui a beaucoup d’atouts... y compris cinématographiques.