À l'aveugle
de Claudio Magris

critiqué par Tistou, le 10 octobre 2018
( - 68 ans)


La note:  étoiles
Dans un labyrinthe, les yeux bandés
Premier ouvrage, pour ma part, de Claudio Magris … et grosse interrogation. C’est toujours conçu ainsi un roman de Claudio Magris ? Je veux dire « aussi illisible » ?
Claudio Magris possède indéniablement l’art d’écrire (ou ses traducteurs Jean et Marie-Noëlle Pastureau, celui de bien traduire). C’est écrit très proprement, on perçoit sans doute aucun l’intelligence et la culture de l’auteur. Mais je ne suis pas persuadé qu’il soit conscient de l’effort qu’il demande à ses lecteurs dans cet ouvrage pour le suivre, conserver un minimum le fil de ses propos et, partant, l’intérêt de ce dont il nous parle. Kaléidoscope est certainement le terme le plus adapté s’agissant de ce roman !
C’est qu’en fait il s’agit, à la base, de la relation par un vieil homme placé dans un hôpital psychiatrique des évènements de sa vie à son psychiatre. Dans un joyeux désordre et un mélange des plus … perturbants. Mais comme en outre il se prend pour Jorgen Jorgensen, aventurier danois du XIXème siècle, qui finit déporté en Tasmanie après être intervenu en Islande, en Angleterre, Salvatore Cippico – le nom officiel ( ? mais rien n’est moins sûr !) de notre narrateur – reprend la biographie dudit Jorgen Jorgensen pour son propre compte, mélangeant allègrement périodes, personnages.
Il faut dire que Salvatore Cippico, le vieil homme en question, a connu bien des drames, entre déportation à Dachau, déportation par Tito au bagne de Goli Otok, dans la Croatie actuelle, l’île nue (comprendre sans arbres et sans eau) où les déportés étaient soumis à la soif permanente, aux humiliations incessantes voire aux tortures (entre « camarades » !!), exil en Tasmanie …
Ca fait beaucoup de « vies » différentes. Si vous y rajoutez celle Jorge Jorgensen, que vous mettez dans un mixeur et que vous mettez sur papier après agitation sérieuse …
C’est proprement imbuvable et je m’auto-décerne la médaille de la ténacité pour être allé jusqu’au bout de ce pavé rébarbatif. Pavé ? Pas vraiment en fait ; 438 pages, mais 438 pages de souffrance à tenter trop régulièrement d’essayer de comprendre qui parle, de quoi et quand.
La complexité pour la complexité n’est pas chose aimable. Pour ma part, je n’aime pas.