Comment ils nous ont volé le football
de Antoine Dumini, François Ruffin

critiqué par Fanou03, le 22 juin 2018
(* - 49 ans)


La note:  étoiles
Qu'est devenu le foot de notre jeunesse ?
A l’heure du football-business, des salaires mirobolants de certains joueurs internationaux, des droits de retransmission exorbitants, Antoine Dumini, en collaboration avec François Ruffin, a commis cet essai assez court (150 pages) en guise de manifeste, présentant les grandes étapes, les choix, et les individus qui ont conduit, petit à petit, à la libéralisation de ce sport.

Dans une première partie de l’ouvrage, la plus longue, les auteurs détaillent, décennies par décennies, depuis 1960, comment le football de haut-niveau s’est mondialisé, évoluant sur un modèle du football-business assumé. Si les acteurs de cette tendances sont nombreux, les auteurs pointent notamment les responsabilités de João Havelange et Sepp Blatter, deux anciens présidents de les Fédération Internationale. Les auteurs listent ce que sont pour eux les dérives de cette stratégie : transformation d’un sport en activité économique où la question de la compétitivité devient essentielle, domination de la publicité faisant du football un simple vecteur médiatique des multinationales, instabilité financière chroniques des grands clubs, entre soi organisé de l’élite empêchant tout renouvellement, corruption...Le tableau, même si on était conscient de ses grands traits, n’est pas flatteur, c’est le moins que l’on puisse dire.

A contrario, François Ruffin, dans un épilogue émouvant où l’on reconnaît sans peine sa prose vivante et pleine d’humanité, revient sur sa passion du football, issue d’une culture rurale de ce sport. Prenant garde à ne pas idéaliser les « footeux d’en bas », il en brosse néanmoins un portrait très attachant, rendant hommage en particulier aux bénévoles qui ne comptent ni leur temps, ni leur propre argent pour faire fonctionner les « petits clubs » et « plier les maillots », à mille lieux évidemment du football-business, mais pointant aussi la fragilité de ce fonctionnement.

La partie historique du livre s’avère fort édifiante et illustrée d’anecdotes marquante de l’histoire du football qui m’était souvent inconnue. Je lui reprocherait presque cependant d’être un peu trop brève : elle aurait pu s'enrichir largement par une matière plus abondante, tant le sujet est passionnant. A noter que si l’engagement politique des deux auteurs ne fait pas de doute à travers cet essai, il demeure cependant mesuré me semble-t-il. François Ruffin et Antoine Dumini concluent avec tristesse que la marchandisation du football ne fait que refléter celle de notre société tout entière.