La place forte
de Quentin Lafay

critiqué par Fanou03, le 11 juin 2018
(* - 49 ans)


La note:  étoiles
Le rapport de l'homme au pouvoir
Plusieurs années après un passage éclair (six jours) dans un gouvernement prônant la sortie de la France de la zone euro, décision à laquelle il était opposé, un ancien Ministre des Finances livre sa version des faits et la raison profonde qui l'a poussé à donner sa démission.

Il y a un parfum de Quai d’Orsay, la bande-dessinée de Christophe Blain et Abel Lanzac dans ce roman, mais avec l’humour et l’extravagance en moins. C’est en effet d’abord une vision assez désabusée du pouvoir qui nous transmet Quentin Lafay, avec ce portrait d’un universitaire devenu ministre. La solitude, dans les bureaux de Bercy, est palpable, peuplée semble-t-il seulement de quelques conseillers et des hommes de l’ombre, comme le chauffeur ou le garde du corps. Quentin Lafay interroge, avec beaucoup de perspicacité (et de nuance) aussi bien ce qu’est le courage politique, le rapport de l’homme au pouvoir et comment cela peut le transformer.

Il y a dans La place Forte quelques aspects qui m'ont par contre bien moins convaincu. Ainsi la trame affective, qui parcourt en filigrane le roman, et s’en veut même un de ressorts principaux, m’a semblé exploitée de façon maladroite. La cohérence de la nomination même du protagoniste au poste de ministre m’a questionné : un Président de la République voulant sortir la France de la zone Euro nommerait-il vraiment un ministre pro-euro, sans lui dire ? Le geste politique je l’avoue m’a semblé bien peu vraisemblable.

La prose de Quentin Lafay, quoique fort élégante et très académique, m’a semblé quant à elle quelque peu lisse, désincarnée. Elle donne à son narrateur l’image d’un capitaine novice pris dans la tempête et errant dans un navire aux coursives désertées.