La punition
de Tahar Ben Jelloun

critiqué par Pascale Ew., le 5 juin 2018
( - 57 ans)


La note:  étoiles
La bêtise de la répression
L'auteur nous partage son expérience vécue il y a près de cinquante ans et qu'il a mis tout ce temps à pouvoir écrire. Il s'agit d'un emprisonnement dans un camp militaire marocain pendant 19 mois en 1966 pour avoir simplement manifesté pacifiquement en réclamant plus de démocratie. Avec une centaine d'autres étudiants, il sera le jouet de supérieurs fous qui tenteront de leur faire oublier jusqu'à leur identité et les maltraiteront pour le plaisir de voir souffrir, courber l'échine, être humiliés. La survie tient au silence, à l'obéissance aveugle, au reniement de la pensée. Ces maltraitances rappellent étrangement celles entendues à propos des camps de concentration nazis. (Citation : "Ce n'est ni nouveau ni original : face à la sensibilité, l'intelligence, le pouvoir oppose la brutalité et la stupidité. La première arme, c'est l'humiliation, cette violence consistant à nous déclasser, à nous mettre au bord du gouffre")
A la sortie, la peur leur sera inculquée afin que rien ne soit jamais révélé des mauvais traitements subis. Il en restera pour l'auteur des insomnies à vie et l'impossibilité de manger calmement. Par contre, il nous confie que son désir d'écriture est né de cette épreuve inhumaine.
Même s'il reste pudique et ne s'attarde pas trop sur les mauvais traitements, ce récit est poignant, peut-être même justement pour cette raison.
A lire 10 étoiles

Bonjour les lecteurs ...
ATTENTION … COUP DE COEUR !
Je ne le dirai jamais assez .. Découvre, lisez Tahar Ben Jelloun. Chacun de ses récits est une pépite.
Ce livre est un témoignage .. celui de l'auteur qui s'est retrouvé 19 mois en détentions dans des camps militaires sous le règne d'Hassan II roi du Maroc.
Les faits se déroulent en 1965, 94 étudiants vont être "punis" ( le terme est doux, trop doux) pour avoir manifesté pacifiquement.
L'enfermement dans les casernes va se révéler être cauchemardesque, la violence subie n'ayant d'égale que la bêtise des geôliers ne supportant pas ces jeunes intellectuels.
Ils vont tout endurer, vexations, privations, violence.
Leur libération sera précipitée grâce à la préparation d'un coup d'Etat par l'armée.
Après, il va falloir réapprendre à vivre, oublier est impossible, mais il faut avancer et se focaliser sur autre chose.
Tahar Ben Jelloun va continuer ses études de philosophie, écrire .. beaucoup, sur toutes sortes de sujets .
Mais il mettra plus de 50 ans avant de trouver les mots et de coucher sur le papier ces 19 mois de douleur qui l'ont transformé à tout jamais.
Voici un livre qui fait mal et qu'on referme la boule au ventre.
On savait que le Maroc des années 60 n'était pas un pays de bisounours, mais lire ce récit ne peut laisser indifférent.
Que de souffrances, de vie gâchées, d'hommes devenus fous sous le règne tyrannique d'Hassan et de ses sbires.
Un témoignage qu'il faut avoir lu.
Tahar Ben Jelloun est une belle personne, tous ses récits sont fascinants, intelligents, indispensables.
Bref vous l'aurez compris.. ne passez pas à côté de ce récit et des autres !

Faby de Caparica - - 62 ans - 12 décembre 2018


Quand l'humanité résiste ! 10 étoiles

50 ans après les faits, Tahar Ben Jelloun livre le récit de 18 mois d’emprisonnement arbitraire, punition imposée à 94 étudiants en représailles à une manifestation pacifique du 23 mars 1965 dans les grandes villes marocaines...
Sous couvert de service militaire, ces 94 jeunes gens sont ôtés à leur famille et auront à subir outrages, humiliations et sévices sans que nul n’en soit informé.
C’est lors de son enfermement que monsieur Ben Jelloun commence à écrire, écrire pour survivre, écrire pour garder la raison et ne pas perdre espoir.
Car certains y ont laissé la vie, d’autres ont perdu la raison, comment survivre à l’arbitraire, aux mauvais traitements en ignorant si, un jour, vous pourrez à nouveau respirer la liberté.
Ces faits qui l’ont fait naître écrivain l’ont marqué à jamais et comme il le dit si bien à la fin de ce livre : « … pour oser revenir à cette histoire, en trouver les mots, il m’aura fallu près de 50 ans. »
Les mots sont judicieusement choisis pour permettre au lecteur de ressentir l’incompréhension, la peur, l’angoisse de ces détenus ainsi que pour partager les souvenirs, les pensées, les passions qui ont alimenté la résistance morale de l’auteur.
Merci de votre témoignage monsieur Ben Jelloun qui laisse espérer que le meilleur de l’humanité peut triompher du pire.

Bafie - - 63 ans - 15 juillet 2018