L'instant fugace 2
de Collectif

critiqué par Débézed, le 28 février 2018
(Besançon - 77 ans)


La note:  étoiles
Inspiraton soudaine
En musique on parlerait d’une compile à laquelle ont participé divers interprètes mais, en l’occurrence, il s’agit de littérature, c’est donc un recueil que Jacques Flament a eu la bonne idée de produire en rameutant quatre-vingts auteurs gravitant autour de sa maison d’édition. Au cours de ma lecture, j’ai ainsi rencontré des amis que je connais depuis un bon bout de temps maintenant, comme Éric Allard qui a l’honneur d’introduire ce recueil avec son complice Denys-Louis Colaux, des gens que je connais un peu, des gens que j’ai déjà lus ailleurs, et beaucoup d’auteurs dont je n’avais même jamais entendu parler. Jacques Flament ne leur a imposé qu’une seule contrainte, celle de la longueur : une demi page par texte sachant que certains ont eu droit à deux ou trois contributions.

Apparemment, il leur a laissé la liberté du sujet, leur demandant simplement, comme il l’a écrit sur la quatrième de couverture de saisir l’instant fugace où l’inspiration submerge l’auteur, où la muse se fait trop pressante pour ne pas céder à son insistance. « L’instant fugace, c’est l’urgence qui s’impose en quelques phrases, l’évidence du texte fugitif qui éclaire, questionne, étonne, déconcerte ». Chacun a donc choisi son thème, son message, son image, sa réflexion… et étonnement, même s’il existe une grande diversité entre tous les textes proposés, certaines constances apparaissent comme un fil rouge qui relierait les muses de tous ces auteurs. Comme la fille qui « a coincé le billet le long de sa cuisse, entre la fatigue et la misère », bon nombre de textes évoluent entre cette misère et le désespoir, entre la fatigue et la tristesse, entre la solitude et la peur et entre la vieillesse et la mort qu’elle annonce. Il reste tout de même une place pour l’ironie, la fantaisie, le surréalisme voire le burlesque…

De même si chacun a son style, Terpsichore n’est jamais bien loin, soufflant l’inspiration du poète au creux des oreilles des auteurs pour donner la couleur, comme disent les musiciens, à ce recueil, une couleur agrémentée de jolies images, « Il fait nuit sur la ville. Il fait peur dans mon cœur », de formules de style bienvenue, « Partage de l’argenterie et des vieux griefs » et des raccourcis saisissants, « Le lendemain, il prit le train et descendit entre deux stations ».

Mais ce que je retiendrai avant tout, c’est que ces auteurs, et leur éditeur, sont des amoureux des mots comme l’a si bien écrit l’un d’eux à qui je laisserai ma conclusion : « Ah tes mots ! Ils restent coincés dans ta bouche, tes mots. Tu les mastiques, tu les mâches, tu les mâchonnes et tu les mâchouilles … Tes mots, on dirait des oisillons cramponnés aux brindilles de toi qui n’osent pas sortir du nid douillet de ta pensée ».