Les Oeuvres de miséricorde : Fictions & réalité
de Mathieu Riboulet

critiqué par Henri Cachia, le 24 février 2018
(LILLE - 62 ans)


La note:  étoiles
Corps Allemand
Donner à manger à ceux qui ont faim, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, loger les pèlerins, visiter les malades, visiter les prisonniers, ensevelir les morts : tels sont les impératifs moraux édictés par l’Église sous le nom d’œuvres de miséricorde. 
Ces injonctions morales sont ici mises à l’épreuve de l’expérience – réelle ou imaginaire.

Sentiments mitigés sur cet ouvrage, dont l'écriture incontestablement est très brillante. Après un début prometteur, où l'auteur va tester le Corps Allemand, au sens littéral du texte afin de constater ce qu'il reste des trois dernières guerres avec cette nation, un passage nous entraîne dans une exploration sexuelle à plusieurs – réelle ou fantasmée – un peu trop long à mon goût, qui ne sert pas forcément au mieux son sujet.

Chacun a ses obsessions. Celles de Mathieu Riboulet sont les liens entre l'amour, la mort, la transmission non seulement de mémoire, mais également la place de nos ascendants à l'intérieur de nous-mêmes, dans nos corps, nos chairs, nos os.

Aussi, une passion et fascination pour les tableaux du Caravage représentant très souvent des scènes d'égorgement. Il traverse plusieurs pays dans le monde pour y voir les plus grandes de ses œuvres. Mentionnant au passage que tous ceux nés en culture chrétienne sont imprégnés, même s'ils ne les connaissent pas. On ne peut que partager ce sentiment.

Extrait figurant en quatrième de couverture :
...«  Il m’a fallu comprendre comment le Corps Allemand, majuscules à l’appui, après être entré à trois reprises dans la vie française par effraction (1870, 1914, 1939), continue à façonner certains aspects de notre existence d’héritiers de cette histoire. Chemin faisant, j’ai tenté d’y voir un peu plus clair dans les violences que les hommes s’infligent – historiques, guerrières, sociales, individuelles, sexuelles, massivement subies mais de temps à autre, aussi, consenties –, dont l’art et la sexualité sont le reflet et parfois la splendide, indépassable, bienheureuse expression, et de les lier du fil de cet impératif de miséricorde qui fonde notre culpabilité pour être, de tout temps et en tous lieux, battu en brèche.  »...