La jeunesse de mademoiselle X
de Silvia Ballestra

critiqué par Débézed, le 28 janvier 2018
(Besançon - 77 ans)

La note: étoiles

Mr Ténèbres lueur dans les ténèbres

Quand j’ai refermé ce livre, je me suis soudain souvenu que j’avais déjà lu un livre de Silvia Ballestra, « Nina », et je me suis demandé si cette Nina, l’héroïne éponyme de ce roman, ne serait pas la Mademoiselle X de celui que je venais de terminer. Nina et Mademoiselle X sont toutes les deux, à un moment donné de leur histoire, étudiantes à Bologne et amoureuses de Monsieur Ténèbres … mais mes souvenirs de ma précédente lecture sont trop anciens pour que je tire d’autres conclusions.

Mademoiselle X est donc étudiante à Bologne où elle fait des folies avec Monsieur Ténèbres quand elle hérite de la fabrication de pâtes fraîches romaine qui a grassement enrichi son oncle. L’oncle en question ne s’est pas enrichi grâce aux performances de son entreprises mais surtout par l’exploitation des vieilles ouvrières qu’il payait misérablement sans les déclarer. Elle ne peut supporter ce traitement et régularise rapidement la situation des ses employées et leur octroie un juste salaire, mais l’entreprise ne résiste pas à ce traitement et elle doit déposer le bilan. Les salariée se retrouve donc sans aucun emploi ni revenu et se retourne contre elle pour obtenir réparation. Elle sombre alors dans une situation financière catastrophique qu’un industriel local tente d’exploiter en lui adressant une proposition de rachat intéressante pour lui seulement.

Elle décide alors de rejoindre son village d’origine, dans les Marches, pour retrouver le calme lui permettant de réfléchir paisiblement à la suite à donner à l’offre de l’industriel véreux. Arrivé dans village perdu au milieu d’une campagne perdue, elle renoue rapidement avec son amie de jeunesse pour explorer leur passé commun dans ce village sans grande ressource pour des adolescentes en train de devenir des jeunes femmes. Le fait le plus marquant de cette période sera donc la rencontre avec Monsieur Renault, alias Monsieur Ténèbres, alias Sam Shepard le chanteur du groupe Ehhh. Et, ainsi la narratrice raconte la vie dans cette région pauvre où la jeunesse s’ennuyait pendant que les maffieux s’enrichissaient grassement.

Silvia Ballestra déteste les noirs, les curés, les cathos, tous ceux qui sont soumis aux ordres de la noblesse romaine qu’elle décrit en quelques lignes féroces. « La noblesse noire de Rome était la plus sale et la plus absurde qui fût. La plus fasciste, la plus méchante et la plus arrogante, la plus prétentieuse. Ses membres étaient proches des rituels de la terre, ou, plus récemment, des promoteurs les plus illuminés, des professeurs universitaires, des services secrets de l’armée ». Elle semble les rendre responsables de la misère qui règne dans les campagnes des Marches dans le dernier quart du XX° siècle. Le seul éclair de lumière dans cette période peu enthousiasmante sera son amour éphémère pour le chanteur français. « Elle s’était bandée comme une momie au bord du gouffre, elle s’était liée pieds et mains au-dessus de l’abîme. Pas tant, dirais-je …. pour Monsieur Renault (…) que pour l’idée qu’elle s’en faisait. Platonique à tous crins. Romantique à vous couper le souffle. Mais si humaine, au fond ».

Silivia Ballestra peint la vie de la jeunesse dans les campagnes des Marches pendant le dernier quart du XX° siècle, une vie qui ressemble à celle dépeinte par Giovannino Guareschi l’auteur des démêlés entre Don Camillo et Peppone, une vie qui n’aurait pas évolué entre ces deux époques malgré les efforts des Brigades Rouges qui n’ont jamais atteint ces régions périphériques au grand dam, il semblerait, de l’auteur, qui n’aime pas beaucoup tout ce qui vient de Rome, surtout ce qui transite sous la soutane noire.